Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2022 (Reykjavik)
Date de publication française : 2023 (La Martinière)
Traduction (islandais) :
Jean-Christophe Salaün
Genres : Enquête, thriller
Personnage principal : Sunna Robertsdottir
Lara, âgée de 15 ans, est engagée pour l’été par Olöf Blöndal et son épouse Ottar, qui habitent une des rares maisons de l’île de Videy. Puis, un jour, selon le témoignage de ses employeurs, elle fait ses bagages et décide de rentrer chez elle à Reykjavik. On est en août 1956. Or, ses parents ne l’ont pas vue; personne ne l’a aperçue quitter l’île; personne ne l’a croisée sur l’île non plus. Bref, on est sans nouvelles de Lara. Fugue ? Accident ? Ou pire ? Après trente années d’enquêtes, d’entrevues, de reportages, on ne le sait toujours pas.
En 1986, le jeune journaliste Valur Robertson reprend l’enquête. Il examine toute la littérature qui a été publiée sur le sujet, réinterroge les personnes qui auraient eu quelque contact avec elle, et bénéficie d’un coup de téléphone anonyme qui le met sur une piste sérieuse. Comme il s’apprête à publier le résultat de ses recherches, il est brutalement écarté de l’enquête, et c’est sa sœur Sunna qui décide de poursuivre son œuvre. Une heureuse hypothèse lui permet de localiser Lara; de là, l’explication de sa disparition s’éclaire davantage et un témoin improbable lui fait découvrir le pot aux roses.
Les lieux et les personnages principaux sont décrits minutieusement. Les habitants de la capitale islandaise retrouveront leur ville avec plaisir. Et, pour qu’on ne s’égare pas parmi les personnages, un lexique permet de les identifier rapidement. Pour les auteurs, comme c’est le cas habituellement pour Jónasson, la description géographique des lieux, la caractérisation psychosociologique des personnages et la référence aux événements importants qui se passent en Islande à cette époque (comme la rencontre entre Reagan et Gorbatchev, ou le deux centième anniversaire de Reykjavik)) me paraissent plus importantes que la trame policière proprement dite. Elle est au fond très simple, mais ce n’est pas évident à cause du temps passé à raconter la vie de plusieurs personnages.
Au total, le roman est donc intéressant en soi, mais l’intrigue policière comme telle ne casse pas des briques.
Extrait :
Saisie par la solitude des lieux, Sunna se demandait ce qu’avait éprouvé Lara la première fois qu’elle avait posé le pied sur Videy cet été-là. À quinze ans, ce n’était encore qu’une enfant. Ses parents avaient dit qu’elle était venue en mai, l’île avait dû lui paraître plus vibrante dans la clarté du printemps que dans ce crépuscule automnal; une atmosphère d’espoir, d’optimisme. Bien que Videy soit visible depuis la ville, une jeune fille ayant grandi à Reykjavik comme Lara avait dû se sentir totalement dépaysée, infiniment plus proche de la nature, et en même temps tellement libre. Elle était sûrement fière d’acquérir un peu d’autonomie, de gagner son propre argent, de côtoyer des personnes importantes. Aux yeux de la société, Ottar et Olof étaient des citoyens modèles. Personne n’aurait hésité à envoyer son enfant travailler chez eux. Un avocat si respecté, une femme d’excellente famille…

Île de Videy
Niveau de satisfaction :
(4 / 5)