Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2023 (Fleuve éditions)
Genres : Enquête, thriller
Personnage principal : Franck Sharko
Dans la Note au lecteur qui suit l’Épilogue, Thilliez admet qu’il faut se sentir prêt à prendre un pari fou que de consacrer intégralement un roman policier à la mort. Mais il tient à ce que ses polars contiennent des informations sur des sujets d’actualité importants et il a trouvé un bon nombre de « cas de femmes enceintes déclarées en mort cérébrale mais qu’on pouvait néanmoins faire accoucher ». Or, il a cru pertinent d’associer ce phénomène à un thème classique de la philosophie : « La mort du cerveau signifie-t-elle la disparition totale de l’être ? »
Sharko et son équipe traquent un tueur nécrophile. En s’enfuyant, celui-ci assomme la policière Audra Spick, la compagne de Nicolas Bellanger, bon ami de Sharko et de sa conjointe Lucie Henebelle. Poursuivi par Sharko, le malfrat est écrasé par un train. Audra est conduite à l’hôpital. On s’inquiète à bon droit pour elle et pour le petit être dont elle est enceinte. De fait, pendant les 100 premières pages, on disserte sur la mort et on s’apitoie sur le sort du fœtus. Nicolas se renferme sur lui-même, au contraire de Franck qui s’agite de façon excessive. Ça placote sur la vie après la mort et Lucie, obsédée par le fait de retrouver ses deux filles mortes, se persuade que la vie continue après la mort du corps et que le fœtus est un être humain. C’est comme si l’auteur voulait compenser la pauvreté de l’intrigue par les comportements exagérés de ses personnages.
Et, au fait, qu’en est-il de l’intrigue ? L’équipe enquête sur des personnes tellement persuadées qu’elles ont vu l’enfer et qu’elles sont poursuivies par des démons qu’elles finissent par se suicider. De là, on remonte à une sorte de trafic d’organes et à des savants qui se livrent à des expériences pour savoir si la conscience survit à la mort du cerveau.
Thilliez est si hanté par son problème psychophilosophique que l’intrigue policière comme telle en souffre et que ses personnages sont trop excessifs pour être crédibles. Même le fait de sortir Frankenstein des oubliettes n’améliore pas la situation.
Bref, une grande déception.
Extrait :
Lucie se tourna vers la porte fermée avant de prendre la main gauche d’Audra dans la sienne et de se pencher vers son visage, comme lorsqu’on cherche à révéler un secret.
─ Malgré tout ce que les médecins disent, je suis convaincue que tu m’entends, que… que tu es là, quelque part dans cette pièce. Je ne sais pas comment, je ne sais pas sous quelle forme, mais je le sens au fond de moi. Et ton bébé aussi. J’ai besoin que tu me fasses un signe. Que tu me dises que… que la lumière existe. Que tout n’est pas qu’obscurité. Fais-le, Audra. S’il te plaît, juste un signe.
Niveau de satisfaction :
(3 / 5)