7 jours – Deon Meyer

Par Raymond Pédoussaut

7 joursDate de publication originale : 2012 (Seven Days) meyer
Date de publication française : 2013 (Seuil)
Genre : Enquête
Personnage principal : Benny Griessel, capitaine de police au Cap

Benny Griessel a le trac. Ce capitaine de police, ancien alcoolique, sobre maintenant depuis plusieurs mois, vient d’être affecté à l’unité d’élite de la police sud-africaine les Hawks, il a peur de ne pas être à la hauteur. Il est amoureux d’une chanteuse qui est alcoolique. Il redoute de se ridiculiser dans ce milieu artistique qu’il ne connaît pas et il craint que l’alcoolisme de la jeune femme ne le fasse sombrer à son tour. C’est à ce moment que la police reçoit un courrier électronique anonyme d’un individu qui accuse la police de protéger l’assassin d’une belle avocate d’affaire. L’homme menace de tirer chaque jour sur un policier tant que le meurtrier ne sera pas arrêté. La direction de l’enquête est confiée à Benny Griessel. Les menaces se transforment en agressions : un sniper blesse des policiers et exige l’arrestation du meurtrier de l’avocate. L’affaire prend une tournure nationale quand un homme d’affaire influent, d’origine russe, est arrêté. Toutes les forces de polices sont soumises à la pression de la plus haute hiérarchie. Benny Griessel se débat au milieu d’une enquête difficile, de problèmes familiaux et sentimentaux.

L’intrigue est assez classique, c’est la traque d’un sniper. Ce sont les à-côtés de cette traque qui complexifient l’histoire : les transactions financières, les contrats et les montages obscurs avec des intermédiaires qui s’en mettent plein les poches. Le suspense bien maitrisé, il va crescendo au fil des jours. L’auteur a ménagé des fausses-pistes et des retournements qui maintiennent le lecteur en haleine. Une conclusion, assez surprenante, met en évidence que les choses sont finalement plus simples que ce qu’on nous a laissé imaginer.

Le personnage principal n’est pas le flic classique : le gros dur ou le mec taciturne et efficace. Cet ancien alcoolique doute de lui et de ses capacités, qui cependant sont reconnues par les autres. Il se considère comme un raté. Il faut dire que rien n’est facile pour lui : son alcoolisme lui a valu une séparation avec son épouse. Ses enfants l’inquiètent : le fils veut se faire tatouer et la fille fréquente un genre de Monsieur Muscle que Benny appelle le Neandertal. Et surtout, lui l’ancien ivrogne, ne trouve rien de mieux que de tomber amoureux d’une vraie alcoolique. Et puis, il y a cette enquête difficile dans sa nouvelle unité des Hawks où il doit faire ses preuves. C’est un flic à l’ancienne, dépassé par les nouvelles technologies, il ne comprend rien à Twitter et Facebook, les possibilités des Smartphones le dépassent, il doit faire appel à des policiers plus compétents dans ces domaines. Cependant il est tenace et efficace, malgré la mauvaise opinion qu’il a de lui-même.

Le cadre de ce roman est l’Afrique du Sud dans la région du Cap. Il ne nous apprend pas grand-chose sur la société de ce pays, si ce n’est que les noirs sont maintenant intégrés dans la police et que des tensions raciales persistent. On apprend aussi quelques mots d’afrikaans (langue néerlandaise parlée par les colons néerlandais débarqués en Afrique du Sud) et de xhosa (langue d’une ethnie d’Afrique du Sud, principalement présents dans l’est). Un glossaire en fin de livre donne la traduction de ces mots.

En conclusion : ce roman policier classique, assez bien fait sans être exceptionnel, satisfera ceux qui apprécient le suspense et les enquêtes bien léchées mais il pourra laisser sur leur faim ceux qui vont chercher dans les polars plus qu’un simple affrontement bons – méchants : une analyse de la société, une critique des abus, une dénonciation de systèmes…

Extrait :
– Je n’ai pas l’impression que ce soit une question de richesse, continua-t-elle. Les hommes, pour eux, la notoriété est synonyme d’argent. Et de sexe. Mais pour ces femmes, c’est juste l’idée d’être connues. D’être spéciales. J’ai du mal à comprendre ça. Je me suis demandé si ça avait quelque chose à voir avec les Afrikaners et ce que nous sommes devenus, dans cette Afrique du Sud ? Les hommes afrikaners ont perdu leur pouvoir, leur image de supériorité. Il y a tant d’indifférence envers les gens comme eux à présent, il n’y a que de la compassion pour la nouvelle nation, cette entité plus vaste. Est-ce que c’est pour les femmes une façon de restaurer un équilibre ? Un genre de rébellion, un moyen instinctif de combler le vide ? Peut-être que c’est un phénomène universel, trop de gens, plus d’individus ou de tempéraments particuliers, nous tous, nous ne sommes plus que des… canaux.

  – Vous connaissez « See See Rider » de Ma Rainey ? Et Vince Fortuin, le guitariste solo à l’épaule musclée tatouée d’une ancre et aux petits yeux qui se plissaient de plaisir quand ils se mettaient à jouer correctement, avait répondu :
– C’est une chanson lekker, mais peut-être un peu plus enlevée que Ma ?

Ma Rainey – See See Rider Blues

Ma note : 3.5 out of 5 stars (3,5 / 5) 7jours-amb2

 

 

Ce contenu a été publié dans Enquête, Moyen, Sud-africain, avec comme mot(s)-clé(s) , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

4 réponses à 7 jours – Deon Meyer

  1. sergio calamaï dit :

    Avant de lire 7 jours, il faut, à mon avis lire le Pic du diable où l’on fait connaissance avec Benny Griessel et ses tourments avec l’alcool. Les différents héros de Déon Meyer se croisent dans plusieurs opus (Mat Joubert, Benny Griessel,…). A ce jour, ma préférence va à l’âme du chasseur, un road movie dans l’Afrique du sud avec une course entre un ancien guerrier xhosa et des barbouzes pour une histoire sombrement politique.

    • Ray dit :

      J’ai pris « 7 jours » sans avoir lu les précédents ouvrages de l’auteur. Je l’ai trouvé suffisamment autonome pour comprendre toute l’histoire sans connaître les antécédents du héros. Bien sûr on perd l’évolution des personnages que procure une série mais n’étant pas un chaud partisan des séries, je préfère choisir un livre qui n’implique pas d’avoir lu les précédents, ni les suivants pour connaître le fin mot de l’histoire. Mais quand on apprécie un auteur je comprends que l’on lise plusieurs de ses livres.

  2. Je suis loin d’être une experte dans ce genre littéraire que tu sembles particulièrement affectionner. J’aime beaucoup les romans policiers dont le héros est tourmenté, complexe voire incernable. J’aime aussi que l’histoire monte crescendo et les nombreuses fausses pistes. Par contre j’ai peur d’être perdue et même lassée par les montages financiers et autres obscures affaires et ta conclusion me convainc que ce livre n’est pas pour moi.

    La bibliographie de cet auteur est assez fournie, je vais bien trouvé mon bonheur.

    • Ray dit :

      Héros tourmenté et complexe, le capitaine Benny Griessel de Deon Meyer correspond bien à tes goûts : il est ancien alcoolique et amoureux d’une vraie alcoolique. Il a des problèmes avec ses gamins et il se considère comme un raté alors que c’est un policier reconnu et efficace. Ma conclusion précise que bien qu’étant un polar sud-africain, on n’y trouve pas grand chose de vraiment spécifique à l’Afrique du sud si ce n’est une cohabitation des blancs et des noirs dans la police. Et je pense que les autres livres de Deon Meyer sont de la même veine. Je ne sais pas si je peux me permettre un conseil étant donné que tu sembles avoir une bonne culture littéraire mais si tu cherches des personnages tourmentés et une intrigue bien conçue je te conseille le livre d’Aníbal Malvar La ballade des misérables . C’est un peu déroutant mais c’est bien à mon avis.

Répondre à Ray Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.