Everglades – R.J. Ellory

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 2024
(The Bell Tower)
Date de publication française :
 2025 – Sonatine Éditions
Traduction (anglais) :
Étienne Gomez
Genre : Roman noir
Personnage principal :
Garrett Nelson, gardien de pénitencier

Août 1976, en Floride.
Garrett Nelson était shérif adjoint dans le comté de DeSoto quand on l’a envoyé en renfort dans un comté voisin pour une opération contre des trafiquants de drogue. Lors de l’intervention, une fusillade éclate, Nelson est blessé. Cette blessure le rend inapte à poursuivre son métier. Lors de sa rééducation, sa kiné lui propose de prendre contact avec son père qui exerce le métier de surveillant dans le pénitencier d’État de Southern State. Par son intermédiaire, Nelson est embauché. Gardien de prison n’est pas une profession facile, Nelson est traumatisé par la première exécution à laquelle il assiste. Il réussira tout de même à se faire une place dans l’administration pénitentiaire, sans toutefois être parfaitement serein à cause des évènements qui se produisent au sein de l’établissement : émeutes, évasions, suicides. Un jeune prisonnier, étrangement résigné sur son sort, trouble Nelson par sa volonté de ne pas se défendre contre des accusations pourtant pas très solides. Ce nouveau métier sera pour Nelson l’occasion de commencer une nouvelle vie.

L’intrigue montre l’évolution progressive du personnage de Garrett Nelson. Lorsqu’il était shérif adjoint, Nelson avait une vie simple, il faisait respecter la loi sans se poser de questions, il n’avait pas d’épouse, pas d’enfants, pas de famille. C’était un homme seul et il s’en portait très bien. Sa kiné, qui va devenir sa compagne, va le faire rejoindre une famille nombreuse avec cinq enfants en plus du père et de la mère. Il va alors découvrir le sentiment d’unité et d’affection dont ces gens témoignaient les uns envers les autres et à son égard. C’est nouveau pour lui et ça lui impose de nouvelles responsabilités.

Il y a une autre famille dont il fait désormais partie, celle du pénitencier de Southern State. L’établissement a été construit sur le site d’une vieille mission espagnole, au milieu des marécages peuplés d’alligators, de crocodiles, de crotales, de serpents à sonnettes, de mocassins d’eau. L’isolement du lieu renforce les liens entre les employés, il est primordial qu’il y ait un esprit d’équipe. « On fait ça parce qu’il y a des lois, parce qu’il y a une justice, sans quoi c’est l’anarchie ou le chaos total et la vie devient un enfer. C’est un moyen de protéger et de servir. » C’est ce qu’affirme le patriarche qui travaille dans le pénitencier depuis plus de trente ans. Nelson s’intègre bien à cette autre famille, mais contrairement aux autres, il se pose beaucoup de questions et cette nouvelle profession modifie insidieusement sa personnalité.

L’auteur décrit de façon très réaliste la vie au sein du pénitencier. Il montre comment un pacte tacite entre gardiens et détenus s’est mis en place pour que tout puisse fonctionner. En 1976 les États-Unis viennent de rétablir la peine de mort. Une scène d’exécution d’un condamné à mort, décrite avec une grande précision, fait frémir d’horreur. Plus que des arguments ou de longs discours, ce spectacle inhumain est un plaidoyer efficace contre la peine de mort. Se pose également le cas de conscience de ce détenu qui ne veut pas se défendre et qui ne veut pas être défendu. La justice aveugle l’envoie à la chaise électrique, alors qu’il a agi de façon juste. Ce sacrifice assurera la tranquillité d’un être aimé. C’est poignant.

Everglades est un roman dense, abordant de nombreux thèmes tels que le respect des lois, la justice, la prison, la peine de mort, la famille, la paternité … C’est un roman d’une grande humanité dans lequel l’action, la réflexion et l’émotion s’intègrent harmonieusement.

Extrait :
« Ce n’est pas votre vie, monsieur Nelson. C’est la mienne, et surtout celle de Sarah. Vous voulez savoir si je l’aimais ? Oui, je l’aimais. Elle a été le seul véritable amour de ma vie. J’étais en colère, blessé, égaré, désespéré. Je savais ce qu’elle traversait, je savais qu’elle ne pouvait rien y faire. Non, il n’était pas violent, pas physiquement, mais sa violence était plus profonde, plus cruelle, et elle en mourait. On aurait dit une femme torturée à mort. Il n’y avait ni barreaux ni verrous, mais elle était dans une prison, et dans une prison bien pire que celle-ci. Ce jour-là, quand il est rentré, elle n’était pas à la maison. Je travaillais, je faisais une réparation. Il a voulu savoir où elle était. Je n’en avais aucune idée. Il lui avait dit qu’il rentrait. Selon lui, elle aurait dû être là, il ne lui avait pas donné l’autorisation de sortir. Et il avait un pistolet, monsieur Nelson, un putain de pistolet. Il a dit qu’il allait la tuer, et je l’ai cru. Pour moi, il était vraiment dingue. J’étais censé faire quoi ? Le laisser la tuer ? »

Niveau de satisfaction :
4.4 out of 5 stars (4,4 / 5)

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