Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2021
(La noche en la que nos encontró el pasado)
Date de publication française : 2021 – Éditions Métailié
Traduction : espagnol (Uruguay) – René Solis
Genres : Road-trip, roman noir
Personnages principaux : Mario, Wave et Le Nerveux, trois copains argentins qui partent en week-end en Uruguay
Ils sont trois, Mario, Wave et Le Nerveux, anciens élèves d’un lycée de Buenos Aires. Ils ne se sont pas revus depuis trente ans. Ils se sont rencontrés à la pizzeria. Ils ont parlé, ils ont bu et ils ont décidé de faire un voyage en Uruguay pour se souvenir de l’ancien temps. Du moins, c’est ce que Wave, le rocker, leur a servi comme motif de leur escapade. Mario et Le Nerveux se sont laissés convaincre. Les voilà partis dans la vieille Ford Taunus de 1983 de Mario. À la frontière, Wave a une attitude bizarre : il est tout pâle et, malgré la chaleur et la transpiration, il s’enveloppe jusqu’au cou dans sa gabardine. Quel genre de maladie inavouable l’empêche de sentir la chaleur se demandent ses deux copains. Ils passent la frontière sans encombre. Wave se sent mieux et sur les routes de l’Uruguay ils chargent une auto-stoppeuse enceinte depuis plus 36 semaines. Les vrais problèmes vont commencer.
L’auteur met en scène trois hommes, maintenant quinquagénaires, qui n’ont pas réussi grand-chose dans leur vie. Ce sont des losers pleins de regrets et de frustrations. Mario, vit encore chez sa mère, mais il rêve d’avoir un enfant. Avant il doit trouver une femme, comme le lui dit Le Nerveux : « Mais, mec, tu peux pas continuer à sortir te promener avec ta mère, il faut que tu te trouves une nana, que tu fondes une famille. » Le Nerveux n’est pas le mieux placé pour donner des conseils conjugaux. Lui a une femme, mais elle est en train de le quitter parce qu’il la battait. Il a aussi une fille, mais elle ne lui répond pas au téléphone. Wave, lui, vient d’apprendre que sa femme le trompe, avec un mec qui écoute Shakira en plus ! C’est vraiment la honte pour ce vieux rocker. Sa fille est la seule chose de bien qu’il estime avoir faîte mais elle est malade, c’est aux États-Unis qu’il pourrait la faire soigner, mais pour cela il lui faut de l’argent. Il essaie de s’en procurer, mais il n’est pas le mieux armé pour se lancer dans un commerce risqué. Ces hommes se conduisent parfois comme de vrais enfoirés, parfois ils sont marrants, mais le plus souvent ils sont pathétiques. La femme enceinte est du même tonneau.
L’intrigue commence comme un road-trip assez léger puis elle tourne progressivement au roman noir tout en gardant un côté burlesque.
Le livre est rythmé par de nombreux dialogues. Des dialogues comiques, truculents, pleins de malentendus et souvent des dialogues de sourds. Ces différentes formes de dialogue dynamisent le roman et rendent la lecture assez jubilatoire.
Rien à perdre est un livre étonnant, une œuvre tragi-comique où le rire se mêle à la tristesse et au désespoir. Un bon roman pour découvrir la littérature uruguayenne.
Extrait :
– Quel con…
Le mot le fait sursauter. Comme une gifle qui l’arrache de sa rêverie. Il croit d’abord que c’est Mario qui vient de lui dire ça à lui, mais en le regardant il se rend compte qu’en fait, celui-ci ne s’adresse à personne.
– Quel con je suis.
– T’es pas un con… et moi non plus, dit le Nerveux. On n’a juste pas eu de chance.
– Toi, tu as une famille, moi je n’ai personne.
– Comment ça ? Tu as ta mère, tu sais pas ce que je donnerais pour avoir encore mes parents.
– C’est pas pareil, avoir des enfants c’est différent, personne ne se souviendra de moi.
– Oui, bien sûr, ils se souviennent de toi quand ils ont besoin de quelque chose, le reste du temps ils s’en foutent de toi, mais quand il s’agit de réclamer, ils sont les premiers.
– Moi, personne n’a besoin de moi, je me plains de ma mère, mais le jour où elle sera plus là, je sais pas ce que je ferai.
Niveau de satisfaction :
(4 / 5)