Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2010 (Snjóblinda)
Date de publication française : 2016 aux Éditions de La Martinière
Genre : Enquête
Personnage principal : Ari Thór Arason, jeune policier islandais
Ari Thór Arason vient de sortir de l’école de police de Reykjavick, il obtient sa première affectation pour Siglufjördur, un village du nord de l’Islande, près du cercle polaire. Sa petite amie ne le suit pas. À Siglufjördur, il ne se passe jamais rien, personne ne ferme sa porte à clé. Cependant la neige et l’obscurité oppressent Ari Thór, d’autant plus que l’unique route a été coupée par une avalanche. Le jeune homme doit lutter contre une sensation de claustrophobie. Un premier événement va l’occuper : un vieil homme, célèbre écrivain autrefois, a été retrouvé mort au pied de l’escalier du théâtre local. Tout le monde pense que c’est un accident. Mais peu de temps après, c’est une femme qui est recueillie, torse nu dans la neige, grièvement blessée, entre la vie et la mort. Il semble qu’elle ait été agressée. Il se passe maintenant des choses à Siglufjördur. Ari Thór va d’abord mener une enquête de routine qui va se compliquer au fur et à mesure et finir par prendre une direction inattendue.
L’intrigue est assez convenue et le rythme est si lent que l’on a tendance à s’endormir sur le bouquin. Le cadre et l’ambiance, un village isolé, enseveli sous la neige, pourraient rendre le roman intéressant si les effets d’enfermement, de coupure du reste du monde, apportaient tension et angoisse mais cela se limite à un malaise et des insomnies chez le personnage principal. D’autre part des longueurs inutiles contribuent à assommer le lecteur : le pedigree de tous les sociétaires du théâtre est assez indigeste et n’apporte pas grand chose au déroulement de l’intrigue. La dernière partie nous sort un peu de la torpeur ouatée dans laquelle nous étions plongés depuis le début.
Les personnages n’ont pas grand relief. Le jeune Ari Thór n’a pas la fougue que ses 25 ans supposent. C’est un gentil garçon, un peu naïf et même cucul la praline sur les bords : la belle Ugla lui donne un baiser, l’entraîne dans sa chambre, se fout à poil et que fait Ari Thór ? Il s’en va ! Il culpabilise vis à vis de sa petite amie restée à Reykjavick. La demoiselle ainsi délaissée aurait de quoi faire la gueule. Et bien non ! Elle ne lui en veut même pas, elle continue de lui faire les yeux doux. On a du mal à reconnaître dans ces deux là, qui ont pourtant une attirance réciproque, des jeunes gens d’aujourd’hui. Parfois, j’ai eu aussi l’impression de lire un livre pour la jeunesse plutôt qu’un vrai polar.
Snójr est un polar nordique qui vaut surtout par son cadre dépaysant mais il est un brin soporifique par manque à la fois d’action, de tension et de noirceur dans ce monde de blancheur neigeuse.
Extrait :
Il attendit la mi-journée pour allumer la radio et écouter les informations. Une avalanche s’était déclenchée juste au-dessus de la route de Siglufjördur, bloquant l’unique axe de circulation vers la ville. La nouvelle le frappa. Physiquement. Par chance, aucun blessé n’était à déplorer, mais cela signifiait qu’on ne pouvait plus ni entrer ni sortir de la ville. Tout déplacement par voie terrestre ou maritime paraissait inenvisageable. Ari Thór se sentait à la fois ébranlé et découragé. Cet événement le vidait du peu d’énergie qu’il lui restait. Il s’imposa quelques respirations lentes, profondes, mais cela ne changea rien : son cœur cognait toujours furieusement contre son thorax. Il entendit un journaliste annoncer qu’aucune tentative de déblayer la route ne serait entreprise dans la journée, ni sans doute lors de la suivante, car les prévisions météorologiques empiraient. Après cela, le flash info se mua en un bruit parasite, un assemblage incompréhensible de mots.
Il prit le CD dans son sac et le glissa dans la minichaîne, antédiluvienne mais toujours pratique, qui équipait le poste de police. Il monta le volume avant le début du disque. Ce qu’il avait envie d’écouter en cet instant précis ? Le largo de L’Hiver, de Vivaldi.
Et sur ces notes, Noël arriva.
Vivaldi – L’hiver largo
Ma note : (3 / 5)