Apocryphe – René Manzor

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 2018 (Éditions de l’épée)
Genre : Thriller biblique
Personnages principaux : David de Nazareth, fils de Yeshua (Jésus) – Longinus, centurion romain

Le vendredi 7 avril de l’an 30 à Jérusalem, le procureur de Judée Ponce Pilate supervise l’exécution de trois hommes, une exécution atroce : la crucifixion. Parmi eux un homme qui, selon la rumeur persistante, chassait les démons, rendait la vue aux aveugles, guérissait les paralytiques et même ressuscitait les morts : Yeshua de Nazareth (Jésus). Longinus est le centurion romain chargé de l’exécution. En 25 ans de service il n’avait jamais ressenti la moindre compassion pour ses ennemis mais là le regard du supplicié le trouble profondément. Aussi au moment d’achever les condamnés en leur brisant les jambes, Longinus l’épargne se contentant de lui percer le flanc d’un coup de lance. Une blessure non mortelle. À distance un garçon de sept ans observe l’homme cloué sur la croix centrale. C’est David de Nazareth, son fils. Les destins de David et du centurion Longinus sont liés, ils ne le savent pas encore.

Dans ce roman René Manzor revisite les évangiles en donnant une version alternative tout à fait personnelle. Tout n’est pas réinventé, il s’appuie au contraire sur la version officielle de la vie de Jésus, celle donnée par les églises chrétiennes, mais il la fait varier sur bien des points. Ainsi Jésus aurait été marié et aurait eu un fils, David. Il aurait eu aussi un frère. Mais l’intrigue n’est pas centrée sur Jésus, c’est plutôt la vie de ce fils, David, qui est contée, elle est étroitement imbriquée à la rédemption du centurion Longinus.

Les personnages sont nombreux puisqu’on y trouve tous ceux qui apparaissent dans les écrits relatifs à la vie de Jésus et à son enseignement, dans le Nouveau Testament : les apôtres, Ponce Pilate, Barabbas … et d’autres qui sont sortis de l’imagination de l’auteur. De ce fait le roman est dense et touffu. Il s’en dégage une force certaine et une belle ampleur. Mais ce n’est pas une œuvre mystique, ni religieuse. René Manzor a choisi de traiter ce thème sous la forme d’un roman noir, d’après ses propres paroles, alors que sur la couverture apparaît la mention Thriller. En effet il y a beaucoup de rythme, de l’action, des combats, des bagarres, des poursuites et du suspense. Il y a de la violence, du sang, de la sueur et bien sûr beaucoup d’amour. Par moments, le récit prend des allures de péplum. On n’est pas du tout au catéchisme !

Ceux qui connaissent un tant soit peu, l’histoire de la religion chrétienne et la vie de Jésus auront sans nul doute plus de références pour apprécier les modifications que l’auteur a apporté aux versions reconnues par les Églises chrétiennes qui sont seulement au nombre de quatre : évangiles de Matthieu, Marc, Luc et Jean, alors que, selon l’auteur, on dénombre aujourd’hui cent trente-et-un évangiles apocryphes. Voici donc le cent-trente deuxième !

Que ceux qui sont d’une autre religion que chrétienne ou ceux qui ont manqué les séances de catéchisme se rassurent, ce livre est aussi pour eux. Ils liront une histoire passionnante et ils apprendront aussi beaucoup de choses sur l’histoire des juifs, de la Palestine, de l’occupation romaine …

Un livre bien surprenant et audacieux de la part d’un auteur de polars reconnu. Apocryphe est qualifié de Thriller biblique, c’est déjà assez étonnant pour susciter la curiosité mais c’est avant tout une belle fiction, inspirée de faits historiques. Ce roman permet plusieurs degrés de lecture selon la religion de chacun ou son absence. Cette œuvre est le fruit d’une quête personnelle mais elle peut être lue comme un simple polar historique.

Extrait :
Damas, Syrie
À l’approche des fêtes de Pâque, les nuits ressemblaient aux jours. Les rues de Damas étaient noires de monde. À commencer par son artère principale, la Voie droite, où une foule s’était rassemblée pour écouter un homme prêcher devant le Temple de Jupiter. Sa formidable voix résonnait jusque dans les rues adjacentes et attirait de plus en plus de curieux. Il parlait en araméen, en grec et en latin ! Et pas un instant sa voix ne faiblissait
— Alors Yeshua s’est tourné vers la foule et leur a répondu : « Les docteurs de la Loi et les Sadducéens sont assis sur le trône de Moïse. Suivez leur enseignement, mais ne suivez pas toujours leurs actes. »
Des prêtres qui passaient dans le quartier ralentirent le pas, interpellés par les derniers mots qui venaient d’être prononcés.
— « Car ils disent une chose et en font une autre. Ils chargent les gens de fardeaux impossibles à porter quand eux ne lèveraient pas le petit doigt pour le faire. »
Une rumeur d’approbation parcourut l’assistance, ce qui préoccupa grandement les prêtres. Ils s’en allèrent trouver les gardes présents à l’entrée du lieu saint et leur parlèrent en désignant l’orateur qui continuait de haranguer son auditoire de plus en plus captivé :

— « Ils payent leurs taxes à l’occupant, mais refusent l’aumône aux mendiants qui croisent leur chemin. »

Au cœur de cette mêlée titanesque, les esclaves, soutenus par les Six, luttaient pour leur survie.

Niveau de satisfaction :
4.1 out of 5 stars (4,1 / 5)

 

 

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