Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2021 (Héliotrope noir)
Genre : Enquête
Personnage principal : Cyrille Carignan, chef de police de Saint-Hyacinthe
Héliotrope publie des récits qui se rapportent directement à une région du Québec. Dans ce cas-ci, comme le nom l’indique, l’action se situe à Saint-Hyacinthe autour du chef de police Cyrille Carignan.
Ça se passe dans les années 60 : Carignan rêve qu’il joue au golf avec Jack Nicklaus. Sa femme, Agnès, l’entraîne voir Les parapluies de Cherbourg et Le journal d’une femme de chambre, au lieu du film d’action avec Eddie Constantine qu’il avait prévu. Des groupes yéyé inondent les ondes. C’est justement le chanteur et leader du groupe de l’heure les Mégavolts qui meurt calciné au cours d’un incendie qui dévaste sa maison en face du parc Dessaules.
La jeune fille de Carignan a de la misère à s’en remettre; la population réclame presqu’un deuil national; et le maire fait pression pour que l’affaire soit vite classée. On soupçonne un petit délinquant qui semble avoir volé l’automobile du chanteur Danny Dragon. La présidente du fan club de Dragon, Marie-Lys Létourneau, cache les relations mystérieuses qu’elle entretient avec quelques membres des bérets blancs, particulièrement fanatiques dans leur chasse aux dragons (songeons à l’image de Saint-Michel terrassant le dragon) et aux jeunes dévergondés. On découvre que Dragon n’avait pas été réveillé par l’incendie parce qu’il avait été drogué à la xylazine, un puissant somnifère qui a justement été volé à l’école vétérinaire, où travaille un autre suspect, Blaise Cadoret. Le gérant du groupe, Nick Di Lauro, après avoir été tabassé par des investisseurs de la Petite Italie, se prépare à partir pour la Californie; ce n’est pas clair ce qu’il aurait gagné à liquider le groupe des Mégavolts.
Bref, Carignan a pour mission de contenter sa femme, sa fille et le maire, et ce n’est pas certain qu’il aura les moyens d’y parvenir, même avec l’aide de Truchon qui, au contraire, lui apporte une nouvelle qui force Carignan à tout remettre en question.
C’est le premier polar de Breton et c’est un roman bien fait. Une intrigue cohérente, un bon sens de l’humour, parfois décapant, des personnages typés qui nous rappellent de joyeux souvenirs des années 60, un inspecteur sympathique, peu habitué aux drames, mais qui tire bien son épingle du jeu.
Extrait :
La veille, ils avaient soupé ensemble pour la première fois de la semaine. Pour faire plaisir à sa femme, il avait questionné Sylvie sur ses études, ses sorties, ses amies. Il avait été gauche, emprunté, et son intérêt sonnait faux il le savait. Déroutée par cette attention subite, Sylvie avait fourni à son père des réponses brèves, hésitantes. L’exercice n’avait plu ni à l’un ni à l’autre, et Cyrille en avait voulu à sa femme de l’y avoir poussé.
Pensant plaire à Sylvie et piquer sa curiosité, il lui avait parlé de sa rencontre avec les Mégavolts survivants. Mais sa fille avait réagi comme si les Mégavolts n’étaient plus qu’un vague souvenir et le yéyé, une passade ringarde à demi oubliée. Oui, c’est vrai, il avait trouvé sa fille un peu nerveuse, mais c’est lui qui l’avait énervée avec ses questions et son babil. Elle avait quitté la table en vitesse, invoquant l’urgence de derniers préparatifs pour son émission de radio du lendemain avec les Intellniks.
Niveau de satisfaction :
(3,9 / 5)