Les Contreforts – Guillaume Sire

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 2021 – Calmann-Lévy
Genre :
tragédie rocambolesque
Personnages principaux :
Famille Testasecca, propriétaire d’un château fort délabré

Dans l’Aude, sur les contreforts des Corbières, au sud-est de Carcassonne, la famille Testasecca (Tête sèche) habite le château de Montrafet. C’est un château immense, mais en piteux état qui s’effondre de partout. Les habitants n’ont pas les moyens pour le restaurer convenablement, alors ils le rafistolent comme ils peuvent avec des poutrelles de chantier, du ciment et même du fil de fer et du chatterton. Comme c’est un monument historique, un arrêté de péril vise à les exproprier pour faire une restauration sérieuse de l’édifice. Les propriétaires s’y opposent, mais malgré cela le château est vendu et les rapaces de l’immobilier ont lancé un projet de lotissement sur les pentes de la forteresse. Mais les Testasecca n’ont pas l’intention de céder, ils vont défendre le château coûte que coûte.

Les Testasecca font une famille de quatre personnes :

  • Le père, Léon, est un joyeux colosse bagarreur. Jouer des poings et des pieds est pour lui une sorte de jeu, un défoulement salutaire sans aucune méchanceté. D’autres jouent au rugby, lui c’est la castagne son sport. C’est un homme têtu comme un mulet, jamais il ne revient sur une décision. Il est surnommé le Minotaure des Corbières.
  • La mère, Diane, issue d’une riche famille parisienne, était destinée à une vie luxueuse, au lieu de quoi elle s’est retrouvée dans un château en ruines au milieu des Corbières. C’est elle qui gère les affaires courantes.
  • Le fils, Pierre, quinze ou seize ans, est le roi du braconnage. C’est aussi un miraculé d’un feu de forêt provoqué par l’orage. Les gens du coin pensent qu’il a été sauvé par la sinagrie Loghauss. Car sur les pics des Corbières habitent des démones invisibles appelées « sinagries ». Pierre est observé par les habitants des villages environnants comme un phénomène, quelqu’un qui aurait passé un pacte diabolique avec la sinagrie Loghauss. Il est est surnommé le Baron perché.
  • La fille, Clémence, est l’aînée de Pierre. Elle a 17 ou 18 ans. C’est une surdouée du bricolage, elle sait tout faire. Elle a redonné vie à Hyperélectreyon, un tas de ferraille qui était le tracteur monumental ayant appartenu à son grand-père. Ce génie de la mécanique est aussi un maçon compétent capable de réparer les parties les plus détériorées du château. L’informatique, elle connaît aussi, elle est sait retaper de vieux ordinateurs. Toute la famille se fie à elle quand il faut faire quelque chose. Son frère Pierre la voit comme un voilier en suspension à un ou deux mètres au-dessus de la mer. Elle est d’un grand réconfort pour lui.

Outre ces portraits pittoresques, l’auteur fait une description d’une région qu’il doit beaucoup aimer : les Corbières, avec la montagne d’Alaric, la colline de Montahut, les crêtes rocheuses et son désert d’herbes jaunes. Ses légendes, ses vignes et son vin aussi. Un pays à la fois austère et superbe. Toutefois dans cette nature sauvage, il y a un dérèglement : à l’image du château en décrépitude, les chevreuils trop nombreux ravagent les vergers et les cultures.

Guillaume Sire réussit la prouesse de mêler le cocasse et le tragique. En effet quoi de plus grotesque et d’anachronique que de voir de nos jours soixante-dix gendarmes en armes se préparant à donner l’assaut à un château fort dans lequel quatre personnes d’une même famille se sont retranchées. Mais comme il y aura aussi des morts, la farce tourne à la tragédie.

Dans cette histoire fictive du château de Montrafet et de ses propriétaires, l’écriture flamboyante et lyrique donne toute la mesure de l’attachement de l’auteur à la région des Corbières.

Extrait :
Le cœur de Pierre bondit. Il ne faut pas, il ne faut surtout pas flancher. Soixante-dix gendarmes se préparent devant le château. Impossible de se rendre. Pas maintenant. Il voudrait la rassurer, mais les mots ne viennent pas. Une chose est sûre : il est trop tard pour reculer. Ils se battront comme leurs ancêtres avant eux. Ce sera une bataille folle, une bataille absurde, mais l’histoire des Testasecca est faite de cette folie, elle est faite de cette absurdité. Et Pierre et Clémence appartiennent à cette histoire.

Des hordes de chevreuils désorientés ravagent les cultures

Niveau de satisfaction :
4.3 out of 5 stars (4,3 / 5)

 

 

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