La Dame blanche – Denis Zott

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 2022 (Hugo Poche)
Genre :
Thriller
Personnage principal :
La Dame blanche

Puech Begou, un bourg perdu dans le Tarn. C’est ici qu’on doit livrer une Dame blanche qui a été kidnappée dans la maison d’un riche financier, Philippe de la Salle, le roi du lithium. Juste avant d’arriver au village, cependant, un violent accident empêche le plan de se réaliser. Le jeune Thomas, petit-fils du maire Baron, est frappé par l’automobile des kidnappeurs qui prend feu et explose. On retrouve deux hommes brûlés vifs à l’arrière du véhicule, un troisième à l’extérieur victime de deux balles de révolver. Un témoin a vu une jeune femme blonde vêtue de blanc qui s’enfuyait à travers champs.

Cette femme est précieuse pour bien des gens qui ont des motifs différents. Tout le monde la poursuit : les gendarmes du capitaine Roll, le maire Baron et ses hommes, la famille Renard qui s’imagine qu’elle doit valoir beaucoup puisqu’elle paraît si importante, le demi-frère de la jeune femme, Philippe, et ses amis étranges dont un docteur et celui qu’on appelle l’ombre.

Ces poursuivants sont dangereux : pas tellement le capitaine Roll, neveu de Baron, dépourvu de moyens efficaces; mais le maire Baron, au caractère impitoyable, qui domine tous les habitants, qui lui sont redevables, à une exception près, et dont les troupes n’obéissent qu’à lui. L’exception c’est la famille Renard, une famille de dégénérés, qui traitent sadiquement leur domestique Césaire, qui ne respectent rien et font le trafic de drogues. Enfin, Philippe de la Salle a de bonnes raisons de vouloir retrouver sa demi-sœur, bien qu’on apprenne au cours de la poursuite, que son intérêt pour elle est plutôt ambigu.

Et qu’est-ce qu’elle a de si spécial cette Dame blanche, à part son visage de geisha au sourire énigmatique ? Et qu’est devenu Johnny qui avait dirigé l’opération ? Et pourquoi le jardinier du manoir s’est suicidé ? Et c’est quoi cette maison de Puech Begou dont deux pièces semblent être des copies conformes des pièces du manoir ? La battue s’accentue avec des drones et un hélicoptère, les cadavres se multiplient et le lecteur n’y comprend plus rien, victime de bien des retournements de situation.

Les apparents mystères se dénouent. On commence à y voir plus clair. Quel enchevêtrement ! C’est avec un plaisir sadique que Zott a maîtrisé tous les bouts de la chaîne. Encore un peu confus, le lecteur retombe sur ses pattes, tout essoufflé.

Le suspense est bien mené. Plusieurs chapitres courts changent le mal de place et nous tiennent en haleine. Trop de personnages peut-être, ce qui a pour effet de nous détourner de l’essentiel. Certains personnages principaux me paraissent excessifs, ce qui peut nous empêcher d’embarquer complètement : le maire Baron est vraiment très dominant et, surtout, la famille Renard, principalement la mère Germaine, dépasse en cruauté celle de notre Aurore l’enfant martyre [1]. Le domestique noir Césaire est un souffre-douleur exemplaire. Je sais bien que ces cas existent dans la réalité, mais on en trouve un grand nombre dans ce récit, y compris dans la famille De la Salle. Probablement le vent d’autan.  Cœurs sensibles s’abstenir !

Au total, une aventure époustouflante difficile à lâcher.

[1] Aurore Gagnon a vécu de 1909 à 1920 dans un village du Centre du Québec; elle représente le prototype de l’enfant maltraité à qui on a infligé toutes les tortures. Elle a été immortalisée par des pièces de théâtre et des films, dont celui de Luc Dionne en 2005.

Extrait :
On sort sous de gros nuages noirs, Simone crie que ce n’est pas raisonnable. Je l’envoie promener. On est au bord de l’étang quand le tonnerre gronde. On se presse de rentrer. Devant la tourelle sud, je lui montre un chêne centenaire en mauvais état. Je lui dis qu’on va devoir l’abattre. Elle secoue : « Non, il va tomber. Le feu ! » Son petit doigt montre le ciel lézardé d’éclairs.
« Vite ! » Elle me secoue la main, m’incite à courir. Je la suis. Arrivés à l’entrée de la tourelle, on entend un fracas d’apocalypse. La foudre. Je me retourne. Le vieux chêne est coupé en deux. Je la regarde dans ses yeux si bleus.
Comment tu as su ?
Je ne sais pas.
On dirait que ses yeux flambent.
Elle est si différente. Toujours d’un extrême à l’autre. Absente un jour, si vivante le lendemain. Et elle n’a que quatre ans. Elle me fascine. Elle a quelque chose de féerique et de diabolique en même temps.

Niveau de satisfaction :
4 out of 5 stars (4 / 5)

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