Le mouroir des anges – Geneviève Blouin

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 2022 (Alire)
Genre :
Enquête
Personnage principal :
Miuri Mishima-Sauvé, policière

Historienne de formation, Geneviève Blouin a déjà publié des romans historiques pour un jeune public et plusieurs nouvelles dans Solaris. Le mouroir des anges est son premier roman policier. Au cœur du roman, la problématique de l’avortement et l’interaction entre trois personnages d’origine ethnique différente : l’enquêtrice japonaise Miuri Mishima-Sauvé, son collègue noir Jacques Deslondes, et la Québécoise (origine irlandaise) Nicole Aubry (O’Bree).

L’intrigue se développe à partir d’un crime : une femme, assommée, puis ligotée, meurt d’un avortement violent         et mal fait avec une simple tige métallique. Deux autres avortements semblables ont blessé d’autres femmes qui, cependant, n’en sont pas mortes. Ce qu’il y a d’étrange, c’est que ces trois femmes avaient justement pris rendez-vous pour se faire avorter ! En pleine enquête, on apprend que Nicole, secrétaire au poste de police et professeure d’arts martiaux, est maintenant menacée. Elle aussi est enceinte et doit se faire avorter à l’insu de son amant Jacques, qui est contre l’avortement et qui est certain que Nicole finira par vouloir un enfant. D’une part, les policiers doivent découvrir qui est coupable de ces avortements; d’autre part, ils doivent protéger Nicole sans que Jacques s’en aperçoive.

L’enquête est laborieuse même avec le secours de Cédric, imposé par la SQ. Non seulement on ne trouve aucune trace sur les lieux du crime, mais aussi le mobile reste mystérieux : pourquoi avorter des femmes qui veulent, de toute façon, se faire avorter ?

Le personnage de Nicole est  bien décrit. Son ami Jacques est bien intégré : le fait qu’il soit Noir est moins évident que le fait d’avoir été élevé avec quatre sœurs par une mère plus catholique que le Pape. À cause d’une sensibilité excessive, son avenir dans la police ou avec Nicole n’est pas garanti. Miuri est très schématisée, conformément à une idée simplifiée qu’on se fait des Japonais. L’auteure a dit, dans une entrevue, qu’elle voulait montrer que les policiers n’étaient pas tous obsédés par leur travail et qu’il y avait d’autres choses qui comptaient dans leur vie. Ce qui apparaît, en effet, c’est qu’ils se comportent assez souvent comme des ados, soucieux de l’image qu’ils montrent à autrui et animés en grande partie par leurs relations avec les autres.

Les policiers, bien malgré eux, finiront par découvrir la personne responsable de ces avortements-boucheries. Et ils déduiront le mobile sans être très convaincants.

Bref, il y a place pour de l’amélioration, mais la capacité qu’a l’auteure de jouer avec les personnages et de créer une intrigue originale m’apparait comme des atouts prometteurs.

Extrait :
La porte de la salle à manger s’ouvre à la volée, interrompant la Japonaise. Nicole surgit dans la pièce, plonge vers Beaupré, attrape sa boîte de pizza, qui contient encore trois pointes non entamées, et se sauve en courant.
– Euh… commence Jacques, ébahi.
Il a déjà vu Nicole réagir avec excès lorsqu’elle est affamée, mais jamais au point de voler le repas d’un collègue !
– Qu’est-ce qui lui prend ? demande Cédric.
Beaupré se couvre le visage de ses mains, avec une exclamation de bête blessée.
– Oh non !
Miuri place vivement une main devant sa bouche et se met à rire sans retenue.
– Oh oui ! parvient-elle à prononcer.
Son hilarité est si grande qu’elle en a les larmes aux yeux. Jacques pouffe, car le rire de Miuri, rarement libéré, est communicatif. Elle est si mignonne, à se cacher derrière ses mains telle une petite fille !
– Arrête de rire, Mishima ! lui intime Beaupré, en vain (…)
Miuri, dont l’hilarité s’est calmée, s’essuie les yeux, puis ses traits semblent se lisser tandis qu’elle reprend son impassibilité habituelle.
– T’en fais pas, Beaupré, je vais t’aider, dit-elle.
– Tu vas m’acheter de la pizza sans lui dire ? demande Beaupré, plein d’espoir.
La Japonaise secoue la tête.
– Non, je vais appeler toutes les pizzérias du coin pour leur interdire de te servir afin que tu ne succombes pas à la tentation !
Devant l’air ahuri de son partenaire, Jacques ne peut s’empêcher d’éclater de rire.

Niveau de satisfaction :
3.4 out of 5 stars (3,4 / 5)

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