Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2022 – Robert Laffont
Genres : roman noir, post apocalyptique
Personnages principaux : Hugo et Pauline, survivants du cataclysme
C’est la guerre. Une guerre dont on ne sait rien sinon qu’un camp possédant les armes lourdes bombarde l’autre qui essaie de résister avec de faibles moyens. Tout est détruit, mais les bombardements quotidiens continuent. Hugo se terre dans son appartement, du bon côté de la ville. Pauline, du mauvais côté (celui qui est bombardé), a rejoint les résistants qui se sont réfugiés dans les couloirs du métro, où règnent le froid et l’obscurité. Quand Paul, l’ami de Hugo vient mourir chez lui, Hugo décide de sortir dans la ville ravagée. Pauline n’en pouvant plus de l’atmosphère confinée du métro décide de remonter à la surface. C’est très dangereux, mais on peut voir le ciel. Tous les deux errent dans une ville fantôme où le danger est partout.
Le sujet n’est pas nouveau, il a été traité maintes fois. Cependant l’auteur lui donne ici une coloration nouvelle : le cataclysme n’a pas été provoqué par une catastrophe climatique, une explosion nucléaire ou une pandémie, mais par une guerre qui se limite ici à une ville et dans laquelle l’un des belligérants détruit systématiquement tout ce qui existe. Les conditions de vie sont extrêmes, l’air est pollué par des flocons de cendres qui tombent en permanence et s’accumulent partout, dégageant une odeur d’ammoniaque.
C’est dans cet enfer que Hugo et Pauline tentent de survivre, sans autre but que se diriger vers la frontière. La frontière est la ligne qui sépare les parties de la ville coupée en deux. Elle isole tout un quartier soumis aux bombardements, à la destruction et à la mort de tous ceux qui se trouvent à l’intérieur.
L’auteur réussit parfaitement à installer une ambiance oppressante de fin du monde. La survie dans ce milieu ne laisse pas d’autre choix que de tuer pour rester en vie. Cependant il y a quand même quelques moments précieux où l’humanité se manifeste. Pas pour longtemps.
L’écriture est remarquable, claire et sobre, sans fioritures de style, elle est visuelle et plonge le lecteur dans un enfer dantesque.
Dans la neige ardente, roman choral à deux voix, n’est pas un une œuvre post- apocalyptique de plus. Ici l’apocalypse est en cours, c’est la guerre. C’est un livre sombre et intense, à ne pas lire si vous avez le cafard. Cependant il est remarquable par son ambiance particulière et la belle écriture suggestive de l’auteur.
Extrait :
En début d’après-midi, j’ai aperçu la frontière. Une immense clôture à la construction chaotique qui encerclait tout un secteur. Îlot condamné au cœur de la ville. Quelques bâtiments se tenaient encore alentour, de longs immeubles restés debout. Je me suis dissimulé dans leur ombre, à plusieurs mètres de l’amas de barbelés, de fer et de morceaux de verre. Il devait faire dans les trois mètres de large et me dépassait de plusieurs mètres. Je ne voulais pas trop m’approcher. Tout autour, d’un côté comme de l’autre, des mines étaient disséminées çà et là, menaçant de vous arracher une jambe à tout instant.
Cette clôture, ils en avaient parlé longuement à la télévision, alors que les chaînes émettaient encore. Il y avait eu de longs débats sur la question. Des intellectuels en chemise immaculée et des politiciens bedonnants s’écharpaient sur le sujet alors que l’horreur n’en était qu’à son préambule. Je suivais les programmes avec mon père, qui devenait blême à mesure que les nouvelles s’obscurcissaient.
Je me suis concentrée sur la voix cassée, pleine de rage retenue, qui montait en puissance à mesure que le titre avançait. « Proud Mary », une des chansons que je chérissais le plus.
Tina turner – Proud Mary
Niveau de satisfaction :
(4,3 / 5)
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