Ils finiront bien par t’avoir – Sébastien Diaz

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 2023 (Québec Amérique)
Genre :
Très noir
Personnage principal :
Sophie Routhier

Québec Amérique classe ce roman dans la rubrique Première Impression. C’est, en effet, le premier roman de Sébastien Diaz, surtout connu comme animateur télé et comme le réalisateur de la websérie d’horreur Terreur 404.

Ce premier roman de Diaz n’est pas facile à commenter. La composition est particulière : 14 chapitres d’une vingtaine de pages comme s’il s’agissait de nouvelles, sauf que des personnages reviennent d’un chapitre à l’autre. La thématique reste la même : chaque chapitre se termine par une scène d’horreur où des gens connaissent une mort atroce. Chaque mois de l’année correspond à un épisode; le tout se termine par l’application au dernier être humain de la prophétie : ils finiront bien par t’avoir.

Sophie Routhier réapparaît au restaurant l’Impact à Saint-Hubert. Elle était disparue depuis un bon bout de temps et son retour est spectaculaire : elle est couverte de boue, ses cheveux sont sales et elle pue : un cocktail de sueur, de pisse et de poulet avarié. Elle dit être revenue pour avertir les gens que la Fin de Tout approche. Puis, elle leur raconte quelques événements tragiques dont elle vient d’être témoin.

Chacun des chapitres suivants illustre un de ces événements. En mai, par exemple, la jeune Sarah, douée pour la peinture, obtient une bourse qui l’envoie se perfectionner au Royal Holloway College de l’Université de Londres. En visite à la Picture Gallery, elle tombe sur une peinture effrayante d’Edwin Henry Landseer qui représente deux ours polaires mutilant sauvagement des restes humains. Cette expérience la trouble profondément et, quand elle entreprend de la reproduire, elle se mutile sauvagement et se tue.

Les autres épisodes ne sont pas moins sanglants et se terminent toujours par une sorte de carnage. Faut avoir le cœur bien accroché pour passer à travers les douze mois de l’année. Diaz est habile dans la mesure où il commence par souligner quelques problèmes de la civilisation actuelle et il les pousse à l’extrême; le contraste entre la vie quotidienne « normale » et les aboutissements horribles qui la prolongent donne une certaine crédibilité à chaque épisode. Par contre, les monstres chargés de notre anéantissement nous entraînent dans un autre univers, une autre sorte de littérature.

Extrait :
─ T’as pas remarqué qu’il y a quelque chose de bizarre depuis un boutte ? Y’a pus personne nulle part. C’est pu comme avant. À matin, quand je suis allé prendre mon café à la binerie, y’avait pas un chat. Juste moi pis Laurent Potvin. On devrait-tu mettre la clé dans’ porte tu de suite tant qu’à y être ?

─ Le gens sont juste rendus trop occupés peut-être… Ou y veulent pas voir les touristes qui passent dans le coin (…).
─ Je vais te le dire pourquoi les gens disparaissent de la carte tranquillement. Pourquoi y en a qu’on revoit pu. Y ont peur ! Pis je les comprends. Moi j’ai arrêté de regarder les nouvelles. Ça se bat, ça s’entretue… Cette année on a eu de la neige jusqu’au mois de mai, y ont trouvé deux baleines dans le fleuve à Montréal, un ours polaire en Gaspésie…
─ … les Leafs ont gagné la Coupe ! Y a pu rien qui fait du sens !
─ Bingo ! L’autre matin dans le journal, y parlaient d’une Québécoise qui étudiait en Angleterre qui a massacré un autre élève pis un gars du staff à cause d’une peinture ! UNE PEINTURE ! Calvässe ! Une p’tite fille de chez nous ! Je te le dis : le bon vieux temps est fini (…).
Deux semaines plus tard, Dan et Jean-Pierre disparurent eux aussi mystérieusement.
Évaporés, sans laisser de traces.

Sainte-Anne-de-Beaupré

Niveau de satisfaction :
3.9 out of 5 stars (3,9 / 5)

Ce contenu a été publié dans Moyen, Québécois, Roman noir. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.