1991 – Franck Thilliez

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 2021
(Éd de Noyelles)
Genre : Thriller
Personnage principal :
Franck Sharko, inspecteur de police à Paris

Pour s’aventurer dans Thilliez, il faut laisser ses soucis de côté et se rendre entièrement disponible : c’est du solide et quand vous vous empêtrez dedans, ça ne vous lâche plus.

Le premier roman où apparaît l’inspecteur Franck Sharko, c’est Train d’enfer pour ange rouge, publié en 2007. Treize romans de la saga Sharko plus tard, Thilliez a profité de la Covid pour écrire le premier de la série, 1991, date à laquelle le jeune inspecteur Sharko (trente ans) arrive au Quai des Orfèvres. Il n’est pas encore marié à Suzanne  et ne vit pas encore avec Lucie Henebelle. Au Bureau, il est là pour faire ses preuves; c’est actuellement le bleu de service, le numéro 6, derrière Florence Ferriaux, dite le Pitbull, Romuald Fayolle, ou Einstein, Alain Glichard, surnommé le Glaive, Serge Amandier, le flic à l’ancienne, brutal et alcoolique, et le numéro 1, Thierry Brossard, dit Titi (pour les intimes). À un poste de commande, on retrouve aussi Santucci, le Corse, peu aimé, mais aussi acharné que les autres, et efficace.

Sharko est d’abord remisé aux archives où il est chargé de reprendre l’affaire des Disparues du Sud parisien : entre 1986 et 1989, trois femmes ont été enlevées, violées et massacrées. C’est un cas irrésolu sur lequel Amandier s’est esquinté et cassé les dents.

Mais un cas plus urgent exige que chacun collabore : on vient d’être saisi du cas d’une femme attachée à un lit, la tête enfoncée dans un sac; une adresse serait notée derrière la photo remise aux policiers. On la retrouve affreusement mutilée, mais elle ne demeure pas là où on la découvre. Et la propriétaire de l’appartement est, en effet, disparue. Pour en savoir davantage, il faudra explorer le monde du vaudou et de la magie. Et établir un lien avec la série de photographies d’enfants nus trouvée dans l’appartement.

L’affaire est complexe et on n’est pas au bout de nos peines. Le chef coordonne bien les membres de son équipe : Amandier entraîne le jeune Sharko et n’hésite pas à brasser des cages et des individus; le Glaive se spécialise dans les interrogatoires; Einstein déchiffre les codes et tente d’éclaircir les messages énigmatiques; Florence s’investit dans le monde de Houdini et fréquente de près l’étrange Circé. Sharko enquête d’un peu trop près sur le monde des poisons capables en quelques secondes de transformer quelqu’un en zombie. Et il goûtera quelque peu à cette médecine.

L’action se déroule dans un Paris des années 90, capable de titiller la nostalgie même quand on décrit des quartiers mal famés. Et, comme d’habitude, les informations scientifiques s’intègrent bien à l’ensemble : le monde des poisons, du vaudou, de la magie, des troubles sexuels des jeunes enfants. Et on constate à quel point l’usage de l’ordinateur et du cellulaire a transformé le monde d’aujourd’hui.

À côté d’une vie quotidienne décrite avec réalisme, c’est certain que la solution du problème principal a l’air un peu disproportionnée, mais elle me semble convenir à la singularité des énigmes posées.

Extrait :
Souvent Sharko s’acharnait sur des détails dont tout le monde se fichait, et ça la perturbait. La nuit précédente, il avait mal dormi, n’avait pas arrêté de se retourner dans le lit et s’était levé à plusieurs reprises.

Il l’accompagna jusqu’aux quais. Une lumière laiteuse filtrait à travers les immenses verrières grisâtres, très haut au-dessus des voies. Quelques pigeons fatigués erraient en quête de miettes de pain, un homme las nettoyait le sol au jet d’eau. Il n’existait rien de plus triste qu’une gare, tôt un dimanche matin.
─ Tu sais qu’ils m’appellent tous Shark, maintenant, au boulot ? fit-il pour combler le silence, seulement rompu par le bruit de leurs pas. On a tous un surnom. Titi, Pitbull … Shark, ce sera le mien. Qu’est-ce que t’en penses ?
─ Tout ça m’a l’air très animalier …
Sharko lui sourit, ils s’embrassèrent avec passion. Son cœur de requin tendre se serra quand le train s’éloigna, et que les beaux yeux bleus de celle qu’il aimait finirent par disparaître derrière la vitre.
À ce moment-là, il se dit qu’être flic, c’est surtout être seul.

Quai des Orfèvres

Niveau de satisfaction :
4.5 out of 5 stars (4,5 / 5)

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