Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2014 (Missing you)
Date de publication française : 2014 (Belfond)
Genres : Noir, suspense
Personnage principal : Kat Donovan, inspectrice au NYPD
J’ai lu beaucoup de Coben (1962- …), le spécialiste des cas de disparition. Il écrit beaucoup et vite; je n’ai pas le temps de le suivre. Par ailleurs, comme ses romans sont passablement inégaux, j’attends dorénavant qu’on me les recommande. Mes trois préférés ont été : Ne le dis à personne (2001), Juste un regard (2004) et Dans les bois (2007).
Tu me manques commence comme un vrai Coben :
La policière Kat Donovan a été lâché par son fiancé, Jeff, il y a 18 ans, et elle n’a jamais compris pourquoi. C’était quelque temps après l’assassinat de son père, policier comme elle. Même si un truand à la solde du chef de la pègre a endossé ce crime, Pat ne croit pas à sa culpabilité et ne comprend pas pourquoi même les amis de son père tiennent plus à cette version insatisfaisante qu’à la vérité. Un peu pour la distraire de ces obsessions, son amie Stacy l’inscrit malgré elle sur un site de rencontres. Mal lui en prit, parce que Kat découvre la photo de Jeff sur ce site. Et qu’elle tentera de communiquer avec lui.
Pendant ce temps, Gérard Remington, plus ou moins enterré vivant, se fait exécuter dans une ferme où se trament des événements pas très catholiques contrôlés par des psychopathes du genre sadique. Au poste de police, le jeune Brandon supplie Kat de retrouver sa mère disparue. Et Monte Leborne, le supposé meurtrier de son père, sur le point de mourir, confesse qu’il n’a jamais tué de flic. On se doute bien que toutes ces pièces du puzzle finiront par trouver leur place. C’est même en prenant ça pour acquis que le lecteur aura bien des chances de deviner avant Kat le rapport entre la mort de son père et la disparition de Jeff.
Après trois chapitres, je me morfondais : personnages à la limite de la caricature, psychologie 101 pour les nuls, sadiques très méchants, jeunes femmes très naïves, et une inspectrice entêtée mais pas très futée. Puis, on finit par être pris au piège : je n’ai pas pu lâcher les cent dernières pages. Coben a de l’expérience et sait ce qui plaît aux lecteurs : le coup des hackers (Mankell et Larsson), le triomphe des morts-vivants, l’affrontement entre la policière bien ordinaire et l’expérimenté chef de pègre, les multiples miroirs qu’il faut traverser pour parvenir à l’ultime vérité, la fausse conclusion et, pour finir, non pas la vie en rose mais les vertes espérances.
Extrait :
Il l’attendait sur la véranda garnie de meubles en teck. Tout de blanc vêtu. Ses habits étaient tellement ajustés que, d’acceptable sur un homme jeune et bien bâti, sa tenue frisait la vulgarité sur un septuagénaire flasque et trapu comme lui. Les boutons de sa chemise – du moins, ceux qu’il avait pu fermer – semblaient sur le point de craquer, révélant un torse si velu qu’il aurait supporté l’usage du fer à friser Ses doigts boudinés étaient chargés de bagues en or. Il avait encore tous ses cheveux, une belle tignasse blond-roux, ou alors une superbe moumoute… difficile à dire.
− On se rencontre enfin, dit-il.
Eh oui, après toutes ces années de traque, de cauchemars et de haine, elle se trouvait en face de Willy Cozone.
− Je parie que vous avez imaginé ce moment bien souvent, ajouta-t-il.
− C’est vrai.
Il tendit les bras en direction de l’océan.
− C’est comme ça que vous le voyiez?
− Non, répondit Kat. Vous aviez des menottes au poignet.
Il rit comme s’Il n’avait rien entendu d’aussi drôle de toute sa vie (…)
− Sauf votre respect, enlever quelqu’un, surtout un officier de police, sous la menace d’une arme est passible de poursuites.
− Allons, dit Cozone, ne perdons pas de temps à chipoter. On a des choses à voir ensemble.
− Je vous écoute.
− Vous êtes sûre que vous ne préférez pas vous asseoir ?
− Que me voulez-vous, monsieur Cozone ?
Il prit une gorgée de son breuvage sans la quitter des yeux.
− Je me suis peut-être trompé.
Kat ne dit rien.
Il tourna les talons.
− Je vais demander à Leslie de vous ramener à votre voiture. Toutes mes excuses.
− Je pourrais vous faire inculper.
Cozone agita la main.
− Oh, je vous en prie, Kat (…) Inutile de gaspiller notre temps à jouer à ce jeu-là.
Signe de complicité entre Kat et Jeff, la chanson de John Waite : Missing you (titre original du roman) :
John Waite – Missing you