Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2015
Genres : aventures, enquête
Personnage principal : inspecteur Benjamin Sioui (SQ)
En 2005, La Trace de l’escargot avait été, pour moi, un coup de foudre et avait d’ailleurs gagné le prix de Saint-Pacôme. Deux ans plus tard, La Mue du serpent de terre m’avait déçu, l’intrigue policière servant de prétexte à un délire verbal décevant. L’Heure sans ombre est une œuvre ambitieuse : deux romans dont le premier couvre plus de 500 pages. Je me suis lancé dans le premier et ce sera suffisant, ayant dû l’interrompre après presque 200 pages.
Certains critiques ont été enthousiasmés par ce roman, d’autres l’ont laissé tomber. Comment expliquer ce grand écart ? On peut aimer ou pas Holmes et Poirot : au moins, ils s’insèrent dans une histoire habituellement captivante et bien développée. Dans ce cas-ci, le personnage de Benjamin Sioui prend toute la place : il hallucine, il rêve, il fume, il boit, il bande, il philosophe, il poétise. Ou bien, il nous fascine, ou bien il nous horripile. Moi, il m’ennuie simplement, car je n’ai pas beaucoup de goût pour ces élucubrations néo-spiritualistes narcissiques. Il ne se passe pas grand-chose dans un Cuba de pacotille : après deux cent pages, l’enquête est à peine commencée, mais Sioui n’a pas arrêté de parler, le plus souvent avec lui-même.
Extrait :
J’enlève mon chapeau de cow-boy et le dépose à côté de moi, sur le comptoir. C’est bien toi, ça, Benjamin, un Indien portant un chapeau de cow-boy. Inspecteur Benjamin Sioui, l’Indien Lone Ranger et Tonto quanti. Remarque, un chapeau de vacher, c’est peut-être seulement pour justifier mon air de bœuf. En fait, c’est un chapeau Tilley classique, le modèle T3, celui capable d’être mâchouillé par un éléphant et régurgité intact. Un chapeau de baveux, quoi, genre docteur Livingstone en plein safari ou en plein fantasme colonial, alors que je ferais bien plus docteur Dolittle sur la trace du grand escargot rose des mers. Tiens, parlant de volubilité animale, voilà le chat de l’hôtel qui vient frotter ses côtes faméliques contre le mollet replet du touriste. C’est pas mêlant, pour manger autant et rester si maigres, ces chats-là doivent être remplis de vers. Ça doit être des chats poètes. Humour de mononcle. Le seul avantage de vieillir, c’est d’y avoir droit. Y’a pas à dire, tu fais dur des fois, Benjamin Sioui.
Sans note
Il me semble que ma chronique contredit ton commentaire.
« Comment expliquer ce grand écart » Ah! Ah! Ah! je vous trouve bien naïf ou vous faites exprès de ne pas comprendre. Les journalistes et bloggeurs bien connus ont des liens avec les écrivains, surtout dans le même pays. Ils ne vont pas dire du mal du livre d’un copain, ils en assurent même la promotion en douce. Les petits bloggeurs peu connus sont alimentés en livres gratuits, comme ils se sentent honorés ils sont très gentils dans leurs articles. Tout le monde est content sauf le dindon de la farce, le lecteur qui a payé vingt euros pour un livre qu’on lui a décrit comme formidable alors que c’est une bouse. Cela explique ce grand écart.