Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2011 (Vongozero)
Date de publication française : 2014 chez Mirobole Éditions
Genres : roman catastrophe, road movie, thriller psychologique
Personnages principaux : Anna, jeune femme habitant la banlieue de Moscou – Sergueï, son mari – Boris son beau-père
Anna et Sergueï habitaient une belle maison dans la banlieue de Moscou. Tous les matins ils se rendaient dans la capitale pour travailler jusqu’au jour où les accès sont interdits : la ville est en quarantaine à cause d’un virus qui se répand. La situation sanitaire s’aggrave. Pour échapper à l’épidémie, une seule solution fuir vers des régions désertes où le risque de contamination est plus faible. Sergueï se souvient d’une maison sur une île, au milieu d’un lac, en Carélie, au nord-ouest de la Russie, c’est là qu’ils iront se réfugier, à Vongozero, en attendant qu’éventuellement les choses s’arrangent. Leurs voisins dont la maison a été pillée se joignent à eux. Un convoi de trois voitures chargées à bloc, avec neuf personnes à l’intérieur, prend la route dans la neige et le froid. En chemin, une autre voiture, des amis de Sergueï, s’ajoutera à leur caravane. Ils seront désormais onze répartis dans quatre voitures à se diriger vers une hypothétique destination, à travers la campagne russe recouverte de neige, dans le froid glacial. Un périlleux voyage dont l’issue est incertaine.
Vongozero est d’abord un roman catastrophe. L’intrigue est basée sur la pandémie qui frappe non seulement la Russie mais aussi tous les continents. Dans un premier temps, les autorités prennent des mesures : fermeture des établissements publics, mises en quarantaines, ports de masques … puis tout se délite en même temps, les gens meurent ou fuient. C’est le chaos général.
Vongozero est un road movie dans l’immensité blanche de la Russie. Sur les routes enneigées, chaque village rencontré représente à la fois un espoir pour se ravitailler en carburant, mais aussi la menace d’être attaqué et détroussé par des habitants affamés, ou d’être infesté par ceux qui sont malades.
Vongozero est aussi un thriller psychologique. À l’angoisse de la panne ou du manque de carburant s’ajoute la fatigue, le manque de sommeil, la faim et le froid. Sans compter les dissensions qui apparaissent entre les membres du groupe, d’autant plus que Sergueï a emmené son ex-femme et son fils alors qu’il est maintenant marié à Anna, sa nouvelle épouse. L’espace confiné des voitures et le désert blanc tout autour accentuent le malaise. À travers la narration d’Anna on perçoit parfaitement les tensions, les antagonismes, les tentations d’égoïsme, de renoncement, de repli sur soi qui habitent les personnages.
Roman à multiples facettes, Vongozero est un roman réussi qui maintient l’attention et le suspense de bout en bout.
Ce roman a une suite qui s’intitule Le lac, aux mêmes Éditions Mirobole.
Note de l’éditeur : « Initialement publiée peu à peu sur le blog de l’auteur, cette histoire de survie magistrale a suscité un tel enthousiasme qu’elle a fait l’objet d’une enchère entre éditeurs. Elle a depuis été nominée au Prix National Bestseller, vendue au cinéma et traduite dans 4 pays. »
Extrait :
Évidemment, c’était couru, j’en étais sûre, pensais-je pendant que nous roulions dans le sillon tracé par le lourd Land Cruiser ; le Vitara devenu muet se trouvait désormais devant nous, juste derrière le Land Cruiser, et le pick-up qui avait soulagé nos réservoirs de vingt litres de carburant fermait toujours la marche ; nous savions tous qu’il n’y aurait pas assez de carburant jusqu’au lac, mais pourquoi personne ne m’avait-il dit qu’il en restait si peu ? N’avions-nous pas – nous, les femmes et les enfants – le droit de savoir, en prenant la décision de partir du village, que si nous ne trouvions pas de carburant aujourd’hui les moteurs de nos voitures allaient se mettre à tousser puis se tairaient, et que nous allions mourir de froid au milieu de cette terre étrangère, glacée et déserte ?
Aussitôt, la voix basse et rauque de Nina s’éleva dans l’habitacle – «Ne me quitte pas, il faut oublier, tout peut s’oublier, qui s’enfuit déjà » – et le silence qui tambourinait dans mes oreilles reflua sur-le-champ grâce à cette voix …
Nina Simone – Ne me quitte pas (Jacques Brel)