Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2017 (Au Diable vauvert)
Genres : Espionnage, politique, terrorisme
Personnages principaux : Lauren Valence, Commissaire à l’énergie et au climat à Bruxelles – Tanguy Clavel, agent du Service Européen d’Action Extérieure (SEAE)
Lauren Valence vient d’être nommée commissaire à l’énergie et au climat à la Commission européenne, à Bruxelles. Peu de temps après sa nomination, un physicien et un ingénieur nucléaire sont assassinés. Ils sont soupçonnés d’avoir divulgué des informations sensibles. Peut être à cette organisation antinucléaire, INES7, qui a fait survoler par des dizaines de drones les centrales nucléaires européennes ? Consciente du danger que ferait peser sur les pays un accident majeur dans un réacteur à l’uranium, Lauren veut relancer le projet de réacteur au thorium, beaucoup plus sécurisé. Elle va se faire des ennemis puissants qui ne vont pas tarder a ressortir une vieille histoire selon laquelle elle aurait tué son amant alors qu’elle travaillait à la bourse de New York. Cependant les institutions européennes vont avoir plus urgent à traiter : des actions terroristes d’envergure, utilisant des bombes sales radioactives, visent les capitales européennes. Une course contre la montre s’engage contre les terroristes nucléaires.
Dans l’intrigue une multitude de thèmes sont traités : les querelles intestines, le rôle des lobbys, l’influence des états membres, les différentes technologies nucléaires, une histoire d’amour, le passé sulfureux, l’activisme écologiste, le terrorisme d’état. Les personnages aussi sont nombreux et il n’est pas évident de se souvenir du rôle de certains personnages secondaires. L’ensemble dégage une impression de densité et même de complexité. Mais ce qui ressort aussi de la lecture c’est que l’auteure a travaillé la question du nucléaire, qu’elle s’est informée sérieusement. En atteste la longue bibliographie sur le nucléaire qui se trouve en fin d’ouvrage.
Catherine Fradier nous livre un roman militant. Pour elle, la soi-disant sécurité du nucléaire est une illusion basée sur un mensonge. Si le but de l’auteure était de nous sensibiliser sur le danger du nucléaire, il est parfaitement atteint. Les centrales font peser sur les populations un danger permanent comme l’ont déjà démontré les accidents majeurs de Tchernobyl et de Fukushima. Mais pire encore, il y a la menace du terrorisme nucléaire. En utilisant des bombes sales contenues dans de simples valises, les dégâts seraient considérables et les régions touchées deviendraient des zones mortes pour au moins 150 ans. On en frémit d’autant plus que le scénario n’a rien d’invraisemblable. Espérons qu’il n’est pas prémonitoire !
L’écriture simple se lit facilement. L’objectif de l’auteure semble être de délivrer un message fort plutôt que d’avoir une belle écriture. Quelques longueurs concernant les luttes internes alourdissent un peu le récit. On a aussi un peu de mal à croire en la vie sentimentale et sexuellement torride de la commissaire européenne quinquagénaire avec le bel espion Tanguy qui, lui, a décidé d’ignorer les avances permanentes et explicites de la belle et jeune Aneliese.
Il est à noter que les femmes tiennent des rôles centraux dans cette histoire, qu’elles soient technocrates ou terroristes. À signaler aussi que certains pays risquent de ne pas être vraiment ravis de l’image donnée d’eux par cette auteure qui ne manque pas de culot.
Dossier Kastor est un roman d’espionnage et de géopolitique inquiétant, basé sur une importante documentation scientifique avec une intrigue, certes imaginée, mais totalement crédible.
Extrait :
Et vous, monsieur Dautin, vous et votre clique, vous faites partie de ces aveugles incapables de voir le monde tel qu’il est, dans quel abîme il s’enfonce, et ce, par votre faute. Votre lecture de la réalité est sclérosée, parce que vous ne savez raisonner qu’en parts de marché, en plus-values et en maximisation des profits au mépris de la survie même de l’humanité. Ces millions de gens que vous laissez au bord du chemin, vous ne les voyez pas. Vous fabriquez de la destruction sans jamais vous remettre en question. Et lorsque vous vous penchez sur le berceau d’un jeune artiste à qui vous jetez quelques piécettes, vous n’êtes même pas foutu de vous arrêter un seul instant sur l’un de ces visages saisis par le photographe et de vous interroger sur votre responsabilité. Je vous méprise, monsieur Dautin, vous et vos amis, je vous méprise et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour ébranler vos empires. Soyez-en assuré.
Niveau de satisfaction :
(4,1 / 5)