Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2018 (Éditions du Rocher)
Genre : Enquête
Personnage principal : Éva Velasquez profileuse à Interpol
Éva Velasquez, profileuse à Interpol, est envoyée par son patron interroger huit naufragés sur une île au large de Gibraltar. Leur voilier a brûlé et ils se sont échoués sur un rocher volcanique. Ils sont tous de nationalités différentes, ils se sont connus sur Facebook avant de décider de faire une croisière ensemble. Au départ, ils étaient neuf, l’un des passagers a disparu, peut être assassiné par ses compagnons.
L’intrigue est simple : il s’agit pour Éva de reconstituer ce qu’il s’est passé sur le voilier pour en arriver au naufrage, d’identifier le neuvième naufragé, celui qui a disparu, et de trouver les causes de sa disparition. Pour cela la profileuse utilise la méthode des interrogatoires. Uniquement des interrogatoires, il n’y a aucune autre enquête, aucun examen des indices. Tour à tour Éva convoque les rescapés, les fait parler puis recoupe les témoignages. Il faut préciser qu’elle a une technique particulière : elle pose beaucoup de questions anodines qui déstabilisent et dont les réponses sont lourdes de sens pour elle. Elle joue aussi de son physique : sa silhouette de rousse flamboyante, ses grands yeux et sa voix légèrement grave impressionnent. Elle a ainsi acquis une belle réputation d’efficacité au sein d’Interpol.
Au fil des interrogatoires de la profileuse la vision du groupe de jeunes parti en croisière sur la Méditerranée, évolue. Tout se passe bien au début, puis l’ambiance change à cause du comportement prédateur d’un des membres, celui qui a disparu justement. Finalement cela tourne à l’affrontement et même au meurtre. C’est en tout cas ce que les témoignages et les apparences laissent penser. Mais l’affaire se révèle bien plus complexe et Éva, pourtant experte en psychologie, ne serait-elle pas elle-même manipulée ?
L’auteur explique en exergue de son roman le terme anglais de « Mindfuck ». Il concerne une œuvre littéraire qu’on peut qualifier de « déroutante » en français. Cependant l’effet de surprise final recherché implique des retournements qui paraissent assez artificiels. S’astreindre à faire un final inattendu limite finalement les autres possibilités et oblige à une gymnastique compliquée pour proposer cette fin déconcertante au détriment de la crédibilité. C’est bien le cas de ce polar qui, bien que réalisé avec maîtrise, a du mal à convaincre totalement de la vraisemblance du scénario.
Le Neuvième naufragé est une lecture divertissante dont la fin est surprenante, mais finalement pas tant que ça, puisque l’auteur nous l’annonce d’entrée. Quand on nous déclare qu’il y aura une surprise, la surprise est moindre quand elle survient.
Extrait :
Quatre garçons et cinq filles de nationalités différentes s’étaient liés d’amitiés sur Facebook. Ils y avaient créé un groupe pour partager leur passion des voyages et de la voile. Les neuf internautes s’étaient décidés à se rencontrer à Palma de Majorque où ils avaient loué un ketch, le Spanish Queen. La croisière paradisiaque avait fini en enfer. Le voilier s’était échoué sur un îlot avant de brûler. L’un des passagers était porté disparu, probablement noyé au cours du naufrage. Eva comprit l’empressement d’Interpol à intervenir lorsqu’elle releva l’identité de la victime : Dorian Panzer-Vaugel était le fils d’un haut diplomate français en poste à Madrid.
Elle but en contemplant fébrilement l’oisiveté des promeneurs. La radio du bar diffusait un tube de Liam Gallagher qui collait à l’état d’esprit d’Eva.
And I don’t mean to be unkind
But I see what’s in your mind
And the stone you throw
Will turn back in its path
One day you’ll shatter like a wall of glass
Wall of glass
Liam Gallagher – Wall of Glass
Niveau de satisfaction : (3,8 / 5)