Simple mortelle – Lilian Bathelot

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 2018 (La Manufacture de livres)
Genres : Roman noir, roman d’amour
Personnages principaux : Nicole, institutrice à Malissègre petit village de l’Aude – Louis Lacan, habitant de Malissègre et militant écologiste

Nicole rejoint sa première affectation d’institutrice : Malissègre, un petit village au fin fond de l’Aude. Prise dans un violent orage, elle fait la connaissance de Louis Lacan, un habitant de la commune qui vit en solitaire dans son mas. Le courant passe immédiatement entre eux. Ils deviennent amants. Tous les deux ont eu une autre vie complètement différente avant d’atterrir dans ce petit bled. Au contact de Louis, Nicole se sent revivre, elle qui avait auparavant une vie bien morose. Il lui fait découvrir l’amour-passion et la grandeur des paysages de la région. Le barrage, en construction dans la vallée, est pour lui une offense à la beauté du pays. En bon militant écologiste il s’oppose à ce projet. Mais d’autres mènent dans l’ombre des manœuvres aussi secrètes que néfastes.

Les deux principaux personnages, Nicole et Louis, sont tous les deux des êtres en reconstruction. Nicole avant de refaire sa vie, en devenant institutrice alors qu’elle est proche de la cinquantaine, avait élevé seule ses trois enfants. Cette maman courageuse et méritante avait alors une vie sexuelle des plus tristes faîte de fantasmes et de plaisirs solitaires. Louis était légionnaire. Un vrai chien de guerre qui a vécu des scènes terribles au Zaïre ce qui lui a valu des mois d’hospitalisation. Considéré comme un héros par la légion, mais aussi déclaré inapte à poursuivre une carrière militaire. Ce n’est qu’en revenant dans la région de son enfance qu’il est parvenu à retrouver la stabilité et une certaine sérénité. Ces deux personnes vont immédiatement s’apprécier, devenir amants, avoir une sexualité épanouie et vivre un amour fort et réciproque. Une vraie renaissance pour tous les deux. Mais autour d’eux il se trame de dangereuses manigances dont Louis est la cible inconsciente.

Le procédé narratif utilisé est quelque peu troublant. C’est une sorte de zapping : en plein milieu du récit principal, s’intercalent des scènes complètement étrangères dont on n’aura la compréhension que plus tard. C’est un peu comme si en plein milieu d’un film on basculait sur une autre projection en cours avant de revenir au premier film, et cela plusieurs fois au cours du déroulement de l’action. Bien sûr tout finit par converger mais il faut accepter de lire certaines pages sans rien y comprendre tout en supputant avoir l’explication un peu plus tard. Et en plus l’histoire n’est pas racontée par ordre chronologique, ce qui rend encore plus difficile l’entendement. C’est original certes, mais assez déstabilisant. D’autre part ceux qui aiment les enquêtes très structurées où tout est expliqué à la fin peuvent se sentir frustrés que le voile ne soit pas levé sur la raison des agissements néfastes des services de renseignement.

Le décor a une grande importance dans ce roman. Il est constitué par la campagne, les montagnes, les vallées et les grottes de ce coin reculé de l’Aude. On voit une nature puissante mais peu fréquentée ou délaissée, comme ce vieux mas abandonné et cette source qui s’est tarie. On cueille des figues bien mûres et des asperges sauvages. Louis est amoureux de son pays. Il communique sa passion pour la nature à sa compagne, au lecteur aussi.

Simple mortelle est à la fois un roman noir et un roman d’amour. Ce mélange est ici parfaitement réussi. C’est une belle romance sombre et tragique.

Extrait :
Toute trace de malaise s’évanouit et je me retrouvai baignée par la simplicité du monde. Avais-je menti ? La belle affaire… Une peccadille, à peine une maladresse. Frédéric en penserait bien ce qu’il voudrait. Quelle importance ? J’étais bien. Heureuse. Non, pas heureuse. Plus que cela. Vivante. Et peu importait que je ne fasse pas tout de manière absolument parfaite. Je méritais mon indulgence. Je méritais mon amour. J’étais une belle personne, là, dans cette voiture, glissant dans la lumière de ce paysage immense vers cette vieille bâtisse anarchique que j’aimais déjà, avec la chaleur de cette main posée sur ma cuisse droite.

Village de l’Aude

Niveau de satisfaction :
4.1 out of 5 stars (4,1 / 5)

 

 

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