Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2005 (Alire & M. Jobin)
Genres : Suspense financier, procédure policière
Personnage principal : Tony Wiley, escroc
Site de l’auteur : http://www.alire.com/Auteurs/Jobin.html
Je n’ai pas lu le premier roman de Michel Jobin, La Trajectoire du pion, prix 2002 du Salon du livre du Saguenay-Lac Saint-Jean. Cette année, au Salon du livre de Montréal, on m’a conseillé la lecture de ce dernier roman de Michel Jobin que je ne connaissais pas: la Maison d’édition Alire a produit plus d’une centaine de titres et plusieurs des auteurs auraient une réputation internationale bien méritée s’ils étaient plus connus en Europe. Probablement que Jobin ferait partie de ces auteurs. Né en 1968, formé en actuariat et en informatique, sans doute passionné de F1, amateur de bières et de bons vins, apparemment familier avec la Thaïlande et la nourriture asiatique, Jobin a cette capacité d’utiliser ses expériences et ses connaissances pour garantir la crédibilité de ses histoires et la consistance de ses personnages. Ça devient d’ailleurs un peu ironique que, pour se renseigner sur le genre de magouilles économiques qui déterminent réellement le devenir du monde, on ait intérêt à lire des polars (Pelletier, Jobin, Le Roy, Larsson et même Donna Leon), pendant que les émissions d’informations télévisées se repaissent de psychodrames politiques.
Dès le début de l’histoire, j’ai été plutôt surpris de voir ce très québécois Bob Boudrias, tueur à gages, mêlé à l’assassinat d’un célèbre avocat londonien à Kensington Park, et dont on devine qu’il exécute un contrat d’envergure internationale. Très tôt, toutefois, la réticence se résorbe devant le modus operandi des deux malfrats, qui rappellent vaguement ceux de Pulp Fiction. Puis, ça décolle : Londres, Bangkok, Montréal. Pas à l’emporte-pièce comme chez Le Roy. Mais méthodiquement, stratégie des petits pas : présentation des principaux personnages sur leur lieu de travail, histoire d’une petite compagnie québécoise qui profite de la mondialisation pour se constituer en multinationale, biographie d’un petit truand devenu éminent criminel et homme d’affaires respecté des grands de ce monde. Contre lui, la GRC (Gendarmerie royale canadienne), le SCRS (Service canadien du renseignement de sécurité), Scotland Yard et la Police Royale de Thaïlande; mais ces honorables institutions sont handicapées par leur insertion, pourtant logique, à l’intérieur d’une autorité politique. De plus, les ruses des grands financiers pour faire apparaître ou disparaître l’argent tiennent des astuces de Houdini. Dans ce domaine, Jobin manifeste toute sa compétence. Pour certains lecteurs, c’est sans doute un peu long et didactique; pour d’autres, c’est indispensable pour bien comprendre les mécanismes utilisés par les magnats de l’économie et le sens des recherches policières.
C’est un peu le même monde que celui de Jean-Jacques Pelletier, mais on tourne les pages moins rapidement, et on va même relire certains passages. En simplifiant, Pelletier illustre les effets concrets des grandes magouilles, alors que Jobin décrit plutôt leurs mécanismes occultes, les dispositifs d’accumulation et de fuite ou de disparition des capitaux. Dans ce cas-ci, ce sont les corps policiers qui s’agitent mais, souvent, contre ce qui ressemble à des moulins à vent. Leur avantage vient de ce qu’ils peuvent parfois jouer la carte de la solidarité, facilitée par la communication électronique; alors que l’apparente solidarité des Méchants, fondée sur le profit immédiat et personnel, se fissure gravement quand le bateau menace de couler.
Comment Jobin parviendra-t-il à se renouveler après avoir décrit si minutieusement le monde de la finance? Et l’épilogue n’équivaut-il pas à une quasi-promesse de suite? Le fait de se poser ces questions ne signifie-t-il pas qu’on s’en ennuie déjà?
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