Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale :
2019 – Syros
Genres : Science-fiction, post apocalypse
Personnage principal : Lou, jeune fille de 17 ans
Lou veut mourir. Maintenant qu’elle a enterré Guillaume dans un bois en lui lisant un poème de la Pléiade d’Apollinaire, elle n’a plus le goût à la vie. Elle veut mourir mais pas n’importe où, n’importe comment. Ce sera face à la mer, sur la plage où elle a connu un moment de bonheur avec Guillaume, son grand amour. Mais pour atteindre la mer, le chemin est long et semé d’embûches. Et quand elle y parvient, elle s’assied sur la plage et lit L’odyssée, indifférente à la horde de Bougeurs qui se rapproche. Mais d’autres ont observé la scène et ils la sauveront malgré elle. Elle est recueillie dans la communauté Wim, dominée par le Délégué, un genre de gourou, pas si bienveillant qu’il en a l’air au premier abord.
Il serait difficile de lire ce deuxième volet de la trilogie sans avoir lu le premier, Le Grand Effondrement . Ce serait très compliqué de comprendre comment le monde s’est effondré, comment ces créatures d’Entre-Deux (entre les vivants et les morts) ont apparu et quels étaient les rapports de Lou et de Guillaume pour que la jeune fille soit inconsolable au point de vouloir mourir. Ce deuxième tome est donc une suite dépendante du premier.
Nous retrouvons Lou, seule et désespérée dans un premier temps, sous le coup de la mort de Guillaume. Désespérée mais combative quand même pour atteindre son objectif : la plage où elle va se laisser mourir. Mais au lieu de mourir, elle va revivre en trouvant l’amour passion, en la personne d’Amir, un garçon de son âge. Mais ça ne plaît pas à tout le monde alors il faut continuer à se battre. Se battre elle sait le faire, heureusement car ce monde est dangereux. En plus de toutes ces créatures de morts-vivants et il a aussi des humains qui deviennent menaçants quand on contrarie leurs plans. Le roman est rythmé par tous les combats que doit livrer Lou.
L’auteur imagine, à partir des dangers actuels qui nous menacent, une évolution catastrophique de l’humanité. La pollution rend l’air irrespirable, le dérèglement climatique rend les saisons erratiques, les Entre-Deux sont le résultat d’une dépendance aux réseaux sociaux, aux réalités virtuelles ou aux médicaments anti-dépresseurs dont les effets secondaires ont été ignorés. Le mur de la Séparation isole les riches des pauvres. Les Graves sont les contaminés par la radioactivité des centrales nucléaires détruites.
Ce qui est aussi remarquable dans cette dystopie c’est que malgré la catastrophe, il existe un certain optimisme. L’humanisme, l’amitié et l’amour n’ont pas disparu. Même la poésie subsiste. Un monde meilleur peut renaître de ce désastre. D’ailleurs les Hackers des Derniers Jours pensaient qu’il fallait précipiter la chute de ce monde pourri pour pouvoir reconstruire, sur de nouvelles bases, un nouveau monde. C’est ce qu’ils ont fait, ils ont porté le coup de grâce à la société en propageant un virus particulièrement agressif. Tout s’est écroulé, la reconstruction c’est pour plus tard, éventuellement. Reste un monde particulièrement périlleux.
Après Le Grand Effondrement, ce deuxième volet de la trilogie est aussi addictif que le premier. Étant en général allergique à ce genre de suites, je dois avouer que cette fois, après avoir lu les deux premiers livres, j’attends avec intérêt le troisième et dernier tome.
Extrait :
– Donc, on fait quoi, nous, les filles ?
– Tout ce que vous voulez dans la mesure où ça ne met pas votre vie en danger. Ni vos capacités reproductrices.
– Moi, ma vie est en danger si je ne me bats pas, si je ne me bats plus. Je perds mon entraînement, mes réflexes. Je m’amollis. Ça a failli me coûter cher plusieurs fois… »
Et j’ai revu, au Brandhoek-Castel, le moment où je m’étais laissé avoir par Émilien Rozeau à cause de l’eau chaude.
J’ai continué :
« Et puis, je ne vais pas passer ma vie à faire la bouffe pour les hommes ou à apprendre à lire aux mômes. En plus, ça veut dire que les hommes seraient les seuls à manier des armes ? Guillaume m’a toujours appris que la dictature, ça commençait quand une partie de la population – comment il disait, déjà ? -, oui, c’est ça, quand une partie de la population avait le monopole des armes et de la force. Que ça finissait toujours de la même manière : par des massacreurs et des massacrés. Je ne me laisserai pas dépouiller de mes armes, Délégué. Je préfère m’en aller. Et si je m’en vais, je m’en vais avec Cesaria!
Niveau de satisfaction :
(4,5 / 5)