Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2018 (First)
Genre : Essai historique
Personnages principaux : Auteurs et héros
Insérer un voilier à hauts mâts dans une bouteille n’a pas l’air facile, mais c’est moins compliqué que constituer une synthèse historique des romans policiers. Malgré une certaine publicité, je ne crois pas que c’est ce que les auteures ont voulu faire. Un coup d’œil sur le titre des six grandes parties nous en convaincra aisément : 1) Mais qui a tué Roger Ackroyd ? Le roman de détection; 2) On a cassé le vase vénitien : l’avènement du roman noir; 3) Créateurs et créatures; 4) Miroir, mon beau miroir; 5) Vers un avenir radieux; 6) La partie des Dix.
Apparence évidemment d’ordre chronologique, mais n’y comptons pas trop, parce que les auteures cherchent aussi à classer les écrivain(e)s selon certaines thématiques, selon aussi leur origine géographique. Les recoupements sont donc inévitables, et on est souvent renvoyé d’un chapitre à l’autre. Ce qui peut finir par être un peu agaçant.
Ceci dit, devant la somme de travail réalisée et les résultats obtenus, toutes ces critiques sont vraiment inutiles, sauf pour préciser au lecteur ce qu’il va trouver dans ce livre. Aubert et Beunat ont lu beaucoup, elles ont sûrement accumulé un nombre impressionnant de fiches, et leur problème était : sous quelle forme nous livrer tout cela. Il en est résulté un ensemble quelque peu hétérogène mais richement nourri. On risque d’y trouver à peu près tout mais en cherchant bien. Bien sûr, on pourrait déplorer l’absence de certains grands comme Katzenbach, Le Roy, Brandreth, Somoza… ; j’en ai compté une quinzaine. Mais la distribution de ces œuvres est très inégale; et, encore une fois, le nombre de publications est quasi incalculable. C’est pour la même raison qu’on peut difficilement reprocher la minceur du nombre d’écrivains de tel ou tel pays (un seul au Canada ?!).
Les commentaires d’Aubert et de Beunat s’efforcent de créer une certaine unité et les jugements portés sont, la plupart du temps, suffisamment nuancés. C’est avec plaisir qu’on s’attardera dans la dernière partie, celle des Dix, aux incontournables romans policiers, auteurs, films policiers, films noirs, films d’espionnage, séries télé contemporaines et séries télé vintage, et qu’on nous indiquera dix pistes pour trouver de bons polars, dix maisons d’édition et dix collections remarquables.
Bref, on a affaire à deux passionnées du roman policier qui s’évertuent à nous faire connaître les œuvres et les auteurs qu’elles ont rencontrés au cours de leur carrière et, dans bien des cas, particulièrement aimés. Je lis des polars depuis un très grand nombre d’années et ce livre m’a permis de replacer plusieurs auteurs dans leur contexte, d’en apprendre pas mal sur certains d’entre eux et, enfin, de réaliser quelques belles découvertes. Donc, un livre aussi pour les pas si nuls que ça.
Extrait :
Dix bonnes raisons de lire du polar :
1. Parce que le mystère est attirant.
2. Parce que le cerveau humain aime les jeux de logique : l’enquête pure, l’observation/la déduction sont des exercices qui l’alimentent.
3. Parce qu’on « apprend des choses » : sur l’âme humaine, sur l’Histoire, sur les cultures et les mentalités de pays lointains, sur la géopolitique…
4. Parce que c’est le miroir d’une société à un moment donné dans un lieu donné…
5. Parce qu’on aime, dans la fiction, voir le désordre réparé…
6. Parce qu’on est fasciné par le mal…
7. Parce qu’on aime les héros à la morale trouble, les anarchistes et les poètes.
8. Par envie de se divertir : sortir de son chemin. Le polar emmène ailleurs.
9. Par envie d’avoir peur (le délicieux frisson) sans quitter le confort de son fauteuil.
10. Par goût de la violence, et son avatar assez récent, le goût du gore.
Niveau de satisfaction :
(4,4 / 5)