7 milliards de jurés ? – Frédéric Bertin-Denis

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 2020 – Éditions Lajouanie
Genres : Enquête, sociétal, utopie politique
Personnage principal : Manolo El Gordo, dit El Gordete, Inspecteur-chef de police à Cordoue


9 juin 2022.
À Paris (France), Sapporo (Japon), Lagos (Nigéria), New York (États-Unis), Bélem (Brésil), Sidney (Australie), Cordoue (Espagne), des personnalités riches et puissantes des milieux d’affaires sont enlevées simultanément. Le 11 juin 2022, ces enlèvements sont revendiqués par l’Internationale des Victimes du Capitalisme (IVC). Cette organisation instaure un tribunal populaire pour juger les criminels économiques, demande la création d’un tribunal international des crimes économiques contre l’Humanité et réclame l’interdiction d’accumuler des fortunes indécentes tant qu’un seul homme sur terre souffrira de misère. Toutes les polices et services de renseignement du monde sont sur les dents. À Cordoue, c’est l’inspecteur-chef Manolo El Gordo, dit El Gordete, qui est mis sur l’affaire. Mais on lui met aussi dans les pattes un gars des services de renseignements, un type violent, imbu d’idées d’extrême-droite. Ce ne sera pas le grand amour entre les deux hommes et l’enquête en pâtira.

L’histoire est racontée alternativement du côté du policier El Gordo et du côté des activistes. El Gordo est un gros bonhomme d’un quintal, qui apprécie la bonne chère et les vieux whiskies. C’est un humaniste, un brin anarchiste mais qui exerce son métier de façon exemplaire bien qu’étant souvent en conflit avec son chef direct. Il est efficace, c’est un policier à l’ancienne, non violent, qui respecte les gens mais se fait respecter aussi, y compris par sa hiérarchie. Ses idées sont proches de celles des ravisseurs, ce qui ne l’empêche pas de mener une traque sans merci. Les activistes ne sont pas des terroristes sanguinaires. Ce sont des gens qui veulent changer le monde, le rendre moins dur, plus juste. Ils ont choisi de passer à l’action qu’après avoir constaté que l’engagement idéologique non violent ne menait à rien. Ils sont dans la mouvance altermondialiste du contre-sommet de Porto Alegre. Ce sont des utopistes. Bref, ce sont des activistes sympathiques, bien plus généreux et humains que les gens qu’ils ont kidnappés.

Il ne fait pas de doute que l’auteur fait passer ses propres idées à travers ses personnages. C’est le rêve d’un peuple en révolte qui demanderait des comptes aux prédateurs du capitalisme financier, où chacun ferait partie d’un jury universel de 7 milliards de jurés. C’est évidemment complètement utopique mais il n’est pas interdit d’en rêver.

Ce roman mêle une enquête classique prenante et des considérations politiques sur les méfaits du capitalisme sauvage. C’est un polar militant.

Extrait :
Nous, Internationale des Victimes du Capitalisme, revendiquons aujourd’hui les enlèvements de Pierre-Henri de la Marjolie, de Hiro Katajima, d’Ayedeke Obayama, de Debra Spellman, de Graham Matlock, de Pedro Belmonte de la Isla et la tentative d’enlèvement de Gustavo Almeida de Abreu.
Cette femme et ces hommes se sont rendus coupables de crimes économiques contre l’Humanité.
Étant donné l’absence de l’existence d’un tribunal international compétent, ils seront donc jugés par un jury populaire.
Ils sont les premiers à faire face à leurs juges.
D’autres suivront !
Si les profiteurs du système (banquiers, lobbyistes, traders, affairistes…) et leurs bras armés (politiciens, flics, journalistes, avocats d’affaires, patrons de multinationales…) ne veulent pas subir le même sort, c’est simple : il suffit d’accepter le partage équitable des richesses et l’arrêt de la rémunération immorale du capital !

Niveau de satisfaction :
4.1 out of 5 stars (4,1 / 5)

 

 

Ce contenu a été publié dans Enquête, Français, Remarquable. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

2 réponses à 7 milliards de jurés ? – Frédéric Bertin-Denis

  1. Frédéric Bertin-Denis dit :

    Merci pour votre analyse du roman. Juste un petit complétif, les « jurés » c’est à dire nous ne sortons pas « grandis » de ce roman… Le capitalisme sauvage n’existe que par notre complicité !
    Très amicalement et encore merci d’avoir pris le temps de me lire
    Frédéric Bertin-Denis

    • Ray dit :

      « Notre complicité » me paraît un peu exagéré. La plupart d’entre-nous est plus victime que complice d’un système pas vraiment choisi. Il faut une grande culture politique pour refuser un système et en choisir un meilleur.
      Amicalement.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.