Le Cas d’Emily V. – Keith Oatley

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 1993 (The Case of Emily V)
Date de publication française : 1996 (Flammarion, XYZ)
Traduction (anglais) :
Paul Gagné et Lori Saint-Martin
Genres :
Psychologique, historique
Personnages principaux :
Freud, Holmes, Emily

Keith Oatley est né à Londres et il habite maintenant à Toronto. Professeur de psychologie avant tout (Université de Toronto), il a produit cet impressionnant roman qui a mérité le Prix du Commonwealth pour un premier roman. Il a écrit un autre roman historique, Les tumultes du siècle, mais a surtout multiplié les livres et articles de psychologie.

Mise en garde : ce n’est pas parce qu’il y a une mort suspecte ni parce que Holmes et Watson enquêtent qu’on a affaire à un roman policier. C’est plutôt une habile reconstitution historique, fin XIXe-début XXe siècle, en Autriche, en Angleterre et en France, dans laquelle Freud et Holmes se rencontrent et réfléchissent sur le même cas : celui de la jeune Emily, apparemment abusée par son tuteur depuis l’âge de 14 ans, et assez traumatisée pour être traitée par Freud. D’un autre côté, Holmes et Watson sont mandatés par le ministère des Affaires étrangères pour savoir si un certain Mr. S., diplomate britannique, est loyal à la Couronne ou s’il vend des informations secrètes à un pays étranger. Or, ce Mr. S. est justement le tuteur d’Emily et il est décédé suite à une chute dans un précipice alors qu’il se trouvait en présence d’Emily. Holmes cherche à savoir si cette mort a un caractère politique ou si c’est simplement le résultat d’une relation interpersonnelle entre Emily et S.

Le premier tiers du roman (Confession) traite de la thérapie que suit Emily Vincent avec Freud et nous permet de lire le journal d’Emily. On prend connaissance des premiers écrits de Freud jusqu’à L’Interprétation des rêves et à l’élaboration de ses Trois essais sur la théorie de la sexualité. Le journal d’Emily expose les tourments d’Emily, son puissant sentiment de culpabilité : elle s’estime responsable de la mort de son tuteur et s’imagine même qu’elle l’avait probablement provoqué quand elle avait 14 ans. Une deuxième partie (L’Investigation) raconte comment Holmes et Watson se retrouvent dans l’affaire viennoise, s’attarde sur la rencontre entre Freud et Watson et culmine dans l’étonnante collaboration entre Freud et Holmes. La dernière partie (L’obsession) traite des relations entre Emily et son amie Sara. Si la thérapie freudienne a guéri une partie des problèmes d’Emily, sa relation amoureuse avec Sara semble lui avoir redonné le goût de vivre et d’être heureuse, même si des vagues de culpabilité reviennent parfois la hanter.

On le constate : ce roman à mi-chemin entre la fiction et la réalité n’a rien à voir avec un bon thriller comme La solution 7% de Nicholas Meyer. Pour ne pas être déçu, il faut savoir dans quel genre de livre on s’embarque. Cela étant précisé, c’est un très bon roman.

Extrait :
─ Monsieur, poursuivit Holmes, je ne sais pas s’il s’agirait d’un manquement au secret médical, mais j’aimerais beaucoup avoir votre opinion à propos d’un aspect d’une enquête qui concerne une de vos patientes, Miss Emily Vincent. Le Dr. Watson m’a fait part des grandes lignes de l’analyse que vous avez-vous-même faite de cette personne, ainsi que vous en avez rendu compte à l’occasion de votre conférence d’hier soir, quoique, bien entendu, sans révéler de détails à caractère médical.
─ Vraiment, dit le professeur, estomaqué à son tour.
─ Oui, dit Holmes. Je mène une enquête à propos de la disparition du tuteur de votre patiente, émissaire du ministère des Affaires étrangères, qui remplissait ici une mission de quelque importance. S’il est venu à Vienne, c’est peut-être en partie pour voir Miss Vincent. J’ai interrogé cette dernière il y a quelques jours, et elle a affirmé qu’il s’était rendu chez elle, le 6 mai de cette année, et l’a implorée de s’enfuir avec lui (…).
─ Ce que vous me dites me trouble, répliqua le professeur. Vous devez comprendre que la psychanalyse s’apparente en quelque sorte à la confession chez les catholiques. Je suis comme un prêtre qui entend des choses qui ne doivent rejoindre aucune autre oreille et dont les lèvres doivent, sur certaines questions, demeurer irrémédiablement scellées.

Niveau de satisfaction :
4.5 out of 5 stars (4,5 / 5)

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