Chien sauvage – Pekka Juntti

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 2022 (VILLIKOIRA)
Date de publication française :
2023 – Gallmeister
Traduction (finnois) :
Johanna Kuningas
Genres : aventures, grands espaces, sentimental
Personnage principal :
Samuel, meneur de chiens de traîneau

Samuel, dix-neuf ans, ne veut pas travailler à la mine comme son père et tous les descendants hommes de la famille Somerniva. C’est la place des hommes de notre famille, disait son père. Lui, son rêve est d’être meneur de chiens de traîneau. Il part de la maison familiale pour se faire embaucher dans une ferme d’élevage de chiens huskys, en Laponie. Là, un évènement va lui permettre de sortir de ses conditions de travail difficiles : deux chiens se sont échappés de leur enclos et deviennent sauvages. Samuel se sent investi d’une mission : retrouver et ramener ces chiens. Sa ténacité est partiellement récompensée : il réussit à ramener une des deux bêtes, mais l’autre, devenu complètement sauvage, reste insaisissable. À travers les villages, les forêts et les grandes étendues arctiques, il persiste à poursuivre l’animal. Ce qui l’amène à rencontrer Aava, une jeune femme libérée qui lui fait découvrir l’amour. Moins agréable, il découvre aussi le sens de ces roses qu’on lui laisse comme avertissement. Il faut éviter d’en avoir trois : la troisième annonce la mort.

L’intrigue est scindée en trois parties qui restent longtemps indépendantes. Il faut s’approcher de la fin du roman pour qu’elles finissent par converger :
– Une première partie se situe en 2009, c’est le rêve de Samuel : devenir musher, un meneur de chiens de traîneau
– une seconde partie débute en 1942, elle raconte l’histoire d’Aila, la grand-mère d’Aava, la maîtresse de Samuel
– et une troisième partie nous montre Samuel qui dépérit au fil des jours dans une cabane abandonnée en plein hiver au milieu d’une nature glacée.
Cette curieuse construction fait qu’on se demande, au long de la lecture, ce qui rassemble ces trois pièces qui n’ont apparemment rien en commun. Le lien n’est dévoilé qu’en dernière partie.

Le personnage principal est un jeune homme de dix-neuf ans. Il est simple et courageux, il a un rêve aussi simple que lui : avoir son propre attelage de chiens de traîneau. Mais la vie est plus compliquée, il l’apprendra à ses dépens. Dans les villages isolés, les éleveurs de rennes ont une façon particulière de traiter les problèmes et si les roses sont de jolies fleurs, elles sont aussi un avertissement qu’il faut prendre en compte, surtout si on en reçoit plusieurs successivement. Les femmes, que ce soit Aava la maîtresse de Samuel, ou sa grand-mère Aila, sont des femmes fortes. D’ailleurs ces femmes libérées inversent les rapports habituels entre femmes et hommes, ce sont elles qui prennent les initiatives alors que les hommes se conforment et subissent.

Le cadre est celui de la Laponie avec ses forêts profondes, son hiver glacial, ses aurores boréales et ses élevages de rennes. La rivière Tengeliö est souvent évoquée dans les descriptions de paysages. L’auteur décrit aussi comment au nom du développement et de la reconstruction du pays, les forêts et les cours d’eau ont été dévastés.

Chien sauvage est un roman dont les nombreux noms finlandais rendent la lecture un peu ardue, mais totalement dépaysante.

Extrait :
Il lève son museau au ciel et un cri mélancolique se met à résonner au-dessus de l’étendue gelée.
Le chien sauvage hurle.
Quand il a fini de dire ce qu’il avait sur le cœur, il se tourne vers le lac. J’ai l’impression qu’il me regarde.
— Moi aussi, je me sens triste, dis-je si doucement qu’il ne peut pas m’entendre.
Puis je place mes mains en haut-parleur et lui réponds dans un langage que nous comprenons tous les deux, celui des solitaires, utilisé par les égarés pour alerter leur meute.
Je hurle d’une voix grave, tendre, comme si je fredonnais. J’aboie deux fois puis me répands en lamentations. Je chante pour tout expulser, ma tristesse, mon chagrin, et une fois terminé, j’ai l’impression de m’être purgé. J’ignore si je fais partie de la meute de Nanok, mais je sais que nous sommes tous les deux des rejetés et des haïs. Je n’ai rien autant désiré que d’être avec ce chien. Je hoquette comme un enfant qui vient de pleurer. Nanok gémit deux fois avant de disparaître. La neige a mouillé mes vêtements.

Niveau de satisfaction :
4 out of 5 stars (4 / 5)

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