Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2023 – Éditions du Masque
Genres : Thriller psychologique, roman noir
Personnage principal : Scott Mc Brennan, fils d’une vieille famille d’aristocrates
Scoot Mc Brennan se rend à Dun Mansion, le manoir familial, comme chaque année le 24 décembre. C’est l’anniversaire du mariage du patriarche, son grand-père. À la sortie d’un virage, il aperçoit une autostoppeuse. Après une hésitation, il embarque une jeune femme blonde, aussi confiante que mutique et peu curieuse. Ce sera la première fois qu’une étrangère passera les fêtes dans le clan Mc Brennan. De quoi mettre un peu de sel dans la réunion familiale que Scott trouve chaque année plus assommante. En fait il exulte de pouvoir apporter un peu de perturbation dans ce rassemblement annuel immuable. À ce moment-là, Scott ne sait pas encore qu’il va réussir son coup au-delà de ses espérances puisque l’autostoppeuse va être le déclencheur d’un chaos inédit, révélateur de toutes les rancœurs, faisant aussi remonter à la surface un secret bien enfoui depuis des années.
C’est à travers la vision de Scott que nous découvrons la tribu Mc Brennan. Une vieille famille aristocratique, riche et attachée aux traditions qui, chaque année, se réunit la veille de Noël pour célébrer l’anniversaire de mariage du vieux comme l’appelle Scott, le patriarche qui rassemble ses ouailles. C’est sans complaisance que Scott nous décrit les membres de la famille : son père, son grand-père, ses oncles, tantes et leur progéniture. Il n’y a aucune tendresse ni affection dans ces portraits, au contraire ils sont pleins de sarcasmes, de cruauté et même de haine.
C’est peut-être son accident qui a rendu Scott aussi cynique : il y a quatre ans, sa voiture s’est encastrée dans un camion de quinze tonnes. Depuis il est handicapé, il traîne sa jambe gauche, il se meut avec difficulté. Il noie ses soucis dans l’alcool, il ne cache pas qu’il est un alcoolique invétéré, tout le monde le sait, on planque simplement les bouteilles à Dun Mansion. C’est devenu un homme arrogant, désenchanté et indifférent qui a du mal à supporter ses congénères, surtout ceux de sa famille. Mais son œil est aiguisé et son sens de l’observation particulièrement aigu. Scott se complaît dans la provocation et dans la transgression. C’est pour cela qu’il introduit l’autostoppeuse en pleine célébration familiale, telle une mauvaise herbe au milieu d’un gazon anglais. Il jubile alors d’observer les réactions des uns et des autres.
Ce que n’avait pas prévu Scott c’est que la fille qu’il a amenée ferait ressurgir inopinément le drame qui a eu lieu dans une pièce du manoir. Qu’est-ce qui s’est passé dans cette putain de salle de bains ? demande la sœur de Scott. C’est la question qu’il ne fallait pas poser pour maintenir un semblant de sérénité.
L’écriture est claire et incisive. Les phrases sont tranchantes, pleines de sarcasmes, de cynisme et d’un humour noir tout à fait réjouissant.
Le silence des noyées est le roman d’une vieille famille aristocratique anglaise, unie en apparence, mais qu’un petit élément perturbateur va plonger dans le chaos et faire ressurgir les ressentiments d’un passé sordide. Un beau roman, sombre et acerbe.
Extrait :
C’est alors que le patriarche s’immobilise, l’œil attiré par une chevelure blonde qui n’appartient pas à son cheptel. L’autostoppeuse. Mon autostoppeuse. Ses bras retombent, lentement. Je vois ses sourcils se froncer, tandis que monte en moi l’ivresse de l’interdit. Je voudrais croiser son regard mais il ne voit plus qu’elle, comme moi, et pourtant nous n’avons rien bu. Regarde-la, mon invitée, mon inconnue, ma transgression, cette fille que je t’impose parce que je n’ai plus quinze ans, et que tu ne me fais plus peur. Tu te sentiras vieux, Douglas Mc Brennan, et je me sentirai vivre.
Niveau de satisfaction :
(4,3 / 5)