Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2024 – Rivages
Genres : post apocalyptique, anticipation
Personnages principaux : Marceau et son fils Léo – Nour et sa fille Clara
C’est le chaos. Le point de non-retour climatique a été franchi en 2032. Une pandémie a fait cent millions de morts dans le monde. En ce milieu du XXIe siècle, une coupure définitive de l’électricité a précipité l’effondrement. Dans un paysage de désolation marqué par les incendies, un père et son fils, une mère et sa fille, ont trouvé refuge dans une maison délabrée au milieu des forêts calcinées. Le répit est de courte durée : la maison est attaquée par une bande de pillards. Le père est blessé, la fille enlevée. La mère réussit à ramener sa fille, mais ils doivent fuir, d’autres bandes armées peuvent arriver à tout moment. Dans un monde dévasté où le danger est partout, tous les quatre vont cheminer à destination d’une communauté qui aurait réinstallé un embryon de société, ils ont entendu d’autres réfugiés en parler. C’est un long et périlleux voyage, mais peut-être trouveront-ils là-bas un peu de paix et de sécurité. Peut-être …
Voilà, c’est arrivé ! Ce n’est pas faute d’être prévenus par les scientifiques et les experts du climat, mais les puissants et les riches avaient choisi d’ignorer les alarmes et continué de jouir de leur domination. Dans un monde où la civilisation a disparu, où il n’y a ni lois, ni justice, ni organisation sociale, c’est la loi du plus fort qui s’impose, celle des barbares, des groupes armés, des pillards qui violent et tuent. L’avenir se limite au lendemain, les nuits sont sans sommeil, la peur et l’angoisse permanentes.
Le décor n’est que maisons abandonnées, villages désertés, arbres morts, forêts calcinées, ponts effondrés, routes défoncées. Bref, la dévastation. Quelques photos et des vidéos retrouvées sur de vieux téléphones montrent le monde d’avant qui émerveille toujours. Ça paraît si loin, mais c’était il y a un siècle seulement (l’action se situe vers 2120). Dans cet environnement terrible, l’auteur met en scène un groupe de quatre personnes qui est confronté à des situations difficiles, ils doivent s’adapter, combattre, résister, ils s’aiment aussi et préservent un peu d’humanité. Les femmes occupent un rôle de premier plan, c’est par elles que passent les valeurs de protection et de résistance. Elles sont aussi un peu sorcières, elles pressentent les évènements avant qu’ils arrivent, elles se transmettent ce don de mère en fille.
Le titre du livre est tiré du poème la Ballade des pendus de François Villon :
Frères humains, qui après nous vivez,
N’ayez les cœurs contre nous endurcis … (le présent a été remplacé ici par le futur).
Dans ce roman, qu’on n’espère pas prémonitoire, Hervé Le Corre nous montre ce que serait notre vie après la catastrophe qui s’annonce. C’est un avertissement sur ce qui nous attend si nous continuons à ne rien faire. Lecture éprouvante, mais salutaire.
Extrait :
– Qui nous ? Toute la fin du siècle dernier et au début de celui-ci les alertes ont été données, sonnées, gueulées. Il fallait changer de logique, cesser la fuite en avant de l’avidité, de la rapacité des puissants de ce monde qui saccageaient la planète et les peuples par tous les moyens possibles. Catastrophes climatiques, famines, pandémies, guerres. La misère et la barbarie partout. On voyait chaque jour le monde imploser mais on était trop peu nombreux à se rebeller. Les gens s’imaginaient qu’ils échapperaient au pire. Ils achetaient des climatiseurs, des téléphones neufs, ils prenaient des avions, ils regardaient les guerres sur leurs écrans, soulagés qu’elles se déroulent loin d’eux, pleurnichant de temps à autre sur les malheurs du monde pour mettre à jour leur bonne conscience. Pendant ce temps perdu, les maîtres de ce monde-là conduisaient à pleine vitesse vers le bord de la falaise et nous demandaient à nous, pauvres cons, de retenir le bolide pour l’empêcher de basculer. Ils pensaient peut-être qu’ils parviendraient à sauter en marche et quelques-uns ont dû le faire… À cette heure, il en reste probablement quelques-uns dans des forteresses en Norvège ou en Alaska, va savoir, gardés par leurs milices.
Niveau de satisfaction :
(4,3 / 5)