Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2012 (Carnets Nord)
Genres : Anticipation – politique-fiction – Thriller
Personnages principaux : Fjord Keeling, journaliste
Paris crépusculaire dans quelques décennies (ou quelques années ?) : le centre est gangrené par une nouvelle drogue, la D23, les narco-gangs se partagent le ville en zones de trafic, l’insécurité règne partout, les services de l’état ne sont plus assurés. Les banlieues, jadis à l’abandon, retrouvent la prospérité grâce à la redistribution à la population d’une partie des bénéfices du commerce de la drogue. La France part en morceaux : les multinationales développent des zones d’affaires indépendantes, dans les cités du nord les narco-gangs font régner leur propre ordre. Face à cet état de précarité, la Ijing Ltd, grande multinationale, d’origine chinoise, propose aux riches et aux privilégiés un nouveau concept : la ville sécurisée Serenitas. C’est un îlot de tranquillité, une ville artificielle où la sécurité est assurée par 400 miliciens. Aucun délit répertorié pendant deux ans d’existence, des dizaines de jardiniers, balayeurs, femmes de ménage, une école, un hôpital, une médiathèque, une piscine, des terrains de sports … Le ticket d’entrée est à un million d’euros, le loyer annuel de 500 000 euros. On n’accueille pas n’importe qui à Serenitas ! Dans Paris un attentat dans le quartier de Pigalle fait une dizaine de morts, parmi eux des trafiquants notoires. Guerre des gangs ? Fjord Keeling, journaliste solitaire et marginal au plus grand journal de la capitale, se trouvait sur les lieux. Un détail important lui a paru incongru : l’absence totale de policiers dans les moments qui ont précédé l’explosion. L’explication officielle d’une lutte d’influence entre gangs de la drogue ne lui convient pas. Lui, connaît parfaitement le terrain, il juge peu probable que les trafiquants tentent de déstabiliser un équilibre qui leur permet d’obtenir de juteux bénéfices. Il va mener sa propre enquête et les ennuis graves vont arriver.
Dans la première partie du livre Nicholson décrit le cadre et les enjeux économiques et politiques de la partie qui se joue entre un état défaillant au bord de la faillite, contraint de vendre les îles d’Hyères pour se renflouer et les multinationales puissantes qui se substituent à lui progressivement pour offrir aux nantis un environnement de luxe et de sérénité. L’auteur développe l’idée de la disparition de l’État et son remplacement par des organisations privées destinée aux plus riches. Les pessimistes pourront y voir une dérive actuelle tendant à tout privatiser pour le plus grand profit des friqués et des multinationales.
Dans une deuxième partie, le roman tourne au thriller avec la traque du journaliste Keeling et la mise en œuvre du plan diabolique élaboré par Ted Muller-Smith,le gourou de la puissante Ijing Ltd. Ces deux parties de l’intrigue sont parfaitement réalisées et sont toutes les deux passionnantes.
L’écriture, sans fioriture est très efficace. Les personnages sont bien campés et complètement crédibles, que ce soit le personnage principal ou une palette de personnages secondaires très intéressants.
Excellent roman, mais hélas ! Il me semble que la fin de l’histoire n’est pas pas dans ce bouquin. Ce serait suite au prochain numéro ? Le lecteur frustré reste sur sa faim, le scénario n’est pas complètement bouclé. Je verrais bien une suite dont le titre serait Serenity, qui après avoir présenté ici les villes protégées, développerait le concept des nations privées. Attendons ! Espérons simplement que la suite (s’il y a) se limitera à un livre et que l’on ne tombera pas dans le roman feuilleton où il faut acheter une multitude de bouquins pour avoir le fin mot de l’histoire. Dommage car c’est un livre original et captivant, sans ça j’en aurais bien fait un coup de cœur.
Extrait :Les systèmes politiques actuels ont montré leurs limites. C’est au tour des pays administrés par des clients-actionnaires de voir le jour. La nationalité va devenir un produit comme un autre. On peut choisir l’entreprise dans laquelle on travaille. On peut la choisir en fonction de ses valeurs, des avantages qu’elle propose à ses salariés, de sa stratégie de développement, de son risque de faillite, de la personnalité de son patron. De la même manière, on pourra bientôt choisir le pays dans lequel on veut vivre et la nationalité qui va avec.
Un chouette bouquin que j’ai eu plaisir à lire et à chroniquer il y a un petit moment déjà ! Gageons que le suivant soit aussi bon que celui ci , car j’en redemande ! Amitiés!
salut Ray
merci pour ton commentaire et un clin d’oeil à la chute du papier: pour la suite, c’est plutôt bien vu…
Philippe
Le terrain est très bien préparé pour la suite. J’aurais été déçu s’il n’y en avait pas eu. Je l’attends avec impatience.