Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2011 (The Cut)
Date de publication française : 2013 (Calmann-Lévy)
Genres : Enquête, polar urbain
Personnage principal : Spero Lucas, enquêteur privé
Spero Lucas est un enquêteur privé qui travaille pour toutes sortes de clients, y compris les dealers. Anwan Hawkins, est trafiquant de drogue emprisonné, ce qui ne l’empêche pas de continuer à contrôler ses affaires. Il fait appel à Spero Lucas pour qu’il récupère un butin de 130 000 dollars qui a disparu lors d’une livraison de drogue. Moyennant 40% des gains Spero accepte de s’occuper de cette affaire. Il arrive à reconstituer comment les paquets contenant du cannabis, livrés par FedEx à des adresses où il n’y a personne dans la journée, sont interceptés. Mais tout se complique quand les jeunes lieutenants de son commanditaire sont liquidés. Lui-même va être en danger de mort, obligé d’utiliser les grands moyens pour se défendre et résoudre l’affaire.
L’intrigue n’est pas vraiment originale : un trafiquant volé charge un détective de récupérer le magot et d’élucider l’arnaque. Bien sûr les choses ne seront pas aussi simples qu’elles paraissent, mais ce n’est pas un scénario très élaboré.
Le personnage principal, Spero Lucas, n’est pas non plus vraiment pittoresque, ni singulier : ancien combattant de l’Irak, il en est revenu sans trop de dégâts. C’est un fils d’une famille nombreuse et généreuse. Jeune et sportif. C’est un bon gars qui va porter régulièrement des roses sur la tombe de son père, qui fréquente l’église orthodoxe, un peu tombeur de ces dames et un brin écolo, il roule souvent en vélo. C’est un type cool mais il ne faut pas l’énerver sinon il tire dans le tas. Il a fait l’Irak, lui, c’est pas comme les petits branleurs qui se prennent pour des caïds ! Spero est donc efficace et compétent. Pas particulièrement charismatique, ni attachant ou drôle. Il ne provoque ni sympathie ni empathie. Les auteurs américains nous avaient habitués à des personnages moins lisses, plus torturés.
Pelecanos c’est le roi de la description détaillée ! Je ne suis pas contre les détails quand ils apportent quelque chose de plus à l’histoire mais nous infliger de façon systématique la marque des vêtements que portent les personnages est assez agaçant : Pelecanos ne se contente pas de décrire une tenue en disant : « il porte des jeans, des baskets et un tee-shirt » Non ! il écrit : « il porte un Lewis 501, des Adidas Forums basses, noires, un tee-shirt à manches longues Bud Ekins » et c’est ainsi tout le temps. Est-ce bien utile de connaître toutes les étiquettes des fringues dans un polar ? A moins que l’auteur ne soit sponsorisé ? C’est un peu pareil pour les lieux et les trajets : « Il traversa les rues Gallatin et Hamilton, tourna vers Colorado Avenue … Il passa devant le Gold Corner Grocery, puis devant le Louis’ Barber Shop, le Colorado Café, le Florescence Beauty Salon et le marché éthiopien, Mekides». Bon, on a compris que le gars se déplace dans la ville, mais vu de Toulouse, et même de Washington, ce niveau de détail ne fait pas davantage visualiser le trajet, il ne fait qu’alourdir la lecture. Ça ressemble à du remplissage.
Côté positif, l’ambiance de la ville de Washington est bien rendue quand Pelecanos ne nous noie pas dans des précisions superflues. Quelques beaux passages sur la détresse des anciens combattants des guerres étasuniennes et sur les petits caïds qui se prennent pour des tueurs professionnels confirmés.
En conclusion : c’est un roman qui se lit facilement mais que rien ne distingue d’une production moyenne si ce n’est la notoriété de l’auteur dont on pourrait logiquement attendre davantage. Loin d’être inoubliable !
Extrait :Nance et White se prenaient pour des tueurs professionnels. Mécaniciens, ils s’étaient rencontrés chez le concessionnaire de voitures de luxe importées où ils travaillaient. Fatigués de la galère pour joindre les deux bouts et du cambouis sous leurs ongles, ils s’étaient reconvertis en tueurs à gages, dix mille dollars par tête, après avoir fait connaissance avec les sous-fifres d’un dealer, accusé d’homicide, qui amenait souvent sa série E au garage. Leur premier contrat avait été un témoin potentiel. Ils s’appliquaient et ne pratiquaient aucune discrimination. Ils tuaient des femmes et des gars qui n’étaient pas de la partie, si on le leur demandait. Que l’un soit noir et l’autre blanc séduisait les clients. Chacun pouvait se rendre dans certains quartiers sans éveiller les soupçons. Leur réputation grandissant, ils s’étaient mis à commettre plusieurs meurtres par an. Leurs casiers étaient vierges et ils n’avaient jamais été suspectés. Ils se croyaient intelligents et compétents. Ils avaient simplement eu de la chance. Lucas et Constance s’en donnaient à cœur joie, Soon Forward de Gregory Isaac à fond sur la chaîne stéréo de la chambre …
Gregory Isaac - Soon Forward
Salut l’ami ! Bon Pelecanos, c’est un auteur un peu particulier pour moi. Tantôt j’aime et j’adore, tantôt je ne prends pas à son histoire et abandonne en cours de route. Est ce justement son côté hyper descriptif des choses qui fait que parfois je ne décolle pas dans ses aventures? J’en sais rien. Ceci dit, je continue à acheter ses bouquins car quand il m’arrive d’être séduit, je suis plus qu’emballé et je passe un sacré moment grâce à lui.Curieuse relation que j’ai donc avec cet auteur. Amitiés
Salut Bruno ! J’ai lu 2 ou 3 bouquins de Pelecanos, il y a quelques années, et j’en avais gardé un bon souvenir. Ce dernier mettant en scène un nouvel enquêteur (Spero Lucas) ne m’a pas semblé formidable. Un peu trop convenu et un peu trop lisse. Nous avons des auteurs francophones qui nous livrent des romans bien supérieurs à celui-ci, à mon avis.
Amicalement.