Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2014 (Gallimard)
Genres : Thriller politique, Littérature blanche
Personnages principaux : Lorraine K, agent de la DCRI – Philippe Launay, candidat à la présidence de la République française
Philippe Launay est favori pour les prochaines élections présidentielles. Tous les sondages le placent en tête. Son principal rival, du même parti, n’a pas abandonné l’espoir de retourner la situation en sa faveur. Pour cela il essaie de déterrer une vieille histoire qui devrait discréditer Launay. Il s’en suit une lutte pour le pouvoir où tous les coups bas et les chausse-trapes sont envisagés pour détruire la réputation de l’adversaire. Dans ce contexte l’indéboulonnable directeur de la DCRI (Direction Centrale du Renseignement Intérieur) confie à son agent Lorraine le soin d’élucider l’affaire du syndicaliste d’un grand groupe industriel du nucléaire qui a disparu après avoir exécuté sa femme et son fils handicapé. Par la même occasion, il lui est aussi demandé de tirer au clair cette étrange affaire du voilier qui aurait été coulé par un sous-marin. En principe dans un cas pareil, on essaie de dissimuler la présence du sous-marin, pas de la mettre en avant comme ici. Pour masquer quelle manœuvre inavouable ?
À première vue ce livre se présente comme un roman d’espionnage à la manière de John le Carré, Tom Clancy, Robert Ludlum … Mais ce n’est pas vraiment un roman d’espionnage bien que les services d’espionnage et de renseignement fassent partie du décor. C’est plutôt une fiction, proche de la réalité, qui met en lumière une république malade de l’ambition et du goût exacerbé pour le pouvoir des personnalités politiques. On ne peut pas dire que la ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est totalement fortuite. En effet certains personnages du roman évoquent immanquablement des sommités de la politique ou de l’économie française.
Les personnages sont nombreux sans qu’aucun ne soit vraiment prépondérant. C’est une mosaïque de protagonistes et d’actions qui définissent la façon de fonctionner d’un pays à l’approche des élections. C’est touffu, on peut s’y perdre dans les nombreux acteurs de cette histoire si on ne reste pas assez attentif.
Le comportement de tous ces hommes et femmes sensés servir l’état est bien observé : c’est manipulations et cynisme à tous les niveaux. Cependant, contrairement aux meilleurs polars, j’ai trouvé que le roman pèche par manque de rythme et de tension dramatique. C’est bien rendu, réaliste et lucide mais pas vraiment captivant. Peut être parce que l’intention de l’auteur était avant tout de mettre en évidence un fonctionnement dégradé de la république plutôt que d’élaborer un scénario tendu. Dans ce cas l’objectif est parfaitement atteint.
Les trilogies semblent être à la mode. L’emprise est le premier volet de la Trilogie de l’emprise. Le deuxième volet est Quinquennat, paru en mars 2015. Le troisième volet est à paraître.
Extrait :
— Ce que vous ne savez peut-être pas, c’est qu’aussi, semble-t-il, il finance des gens qui soutiennent l’action terroriste non djihadiste en Europe comme l’ETA ou les indépendantistes corses. Pourquoi cela ? Parce que pendant que votre police court derrière les indépendantistes régionaux, les moyens alloués à la lutte contre le terrorisme djihadiste s’en trouvent de fait diminués à l’échelon européen. Mon ami n’est pas du tout partisan du terrorisme. Il ne le finance pas directement. Mais parfois il n’a pas le choix, un peu comme certains restaurateurs corses qui n’ont pas d’autre choix que de verser une obole aux indépendantistes. Alors j’en reviens à ma proposition. Mon ami peut devenir votre correspondant pour les Émirats et même plus largement sur toutes les affaires de terrorisme initiées dans cette partie du monde. La condition, c’est a minima votre neutralité dans la compétition qui m’oppose à Launay.