Le bon frère – Chris Offutt

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 1997 (The Good Brother)
Date de publication française : 2016 (Gallmeister)
Genres :
Grands espaces, roman noir
Personnage principal : Virgil Caudill, habitant de Blizzard, petite ville du Kentucky sur le déclin.

Virgil Caudill a eu deux vies. Il habitait Blizzard, une petite ville du Kentucky sur le déclin. Là, tout le monde savait que son frère, Boyd, a été tué et par qui. Et tout le monde attendait que Virgil venge la mort de son frère. Tous pensaient aussi que Virgil épouserait Abigail, une amie d’enfance. Meurtre ou mariage ? Telles étaient ses options. Virgil a fini par choisir et une deuxième vie à commencé pour lui, ailleurs sous un autre nom. Il est devenu Joe Tiller, habitant de Missoula dans le Montana. Changer de nom, changer de vie, ne résout pas tous les problèmes. Blessé puis recueilli dans une famille de « patriotes » anti-gouvernementaux, il va devoir encore prendre d’autres décisions difficiles.

Dans ce roman Chris Offutt aborde les thèmes de la liberté de choix et du poids de l’entourage. Son personnage principal, Virgil, doit opter pour l’une des deux possibilités : commettre un meurtre pour venger son frère, ce qui implique la fuite et peut être la prison, ou se marier tranquillement en perdant son honneur et toute considération de la part de sa famille, de ses voisins et peut être même de sa femme. Un peu plus tard, au Montana, devenu Joe Tiller, il sera contraint de choisir entre être liquidé par des extrémistes anti-gouvernementaux ou de s’intégrer alors qu’il ne partage pas du tout leurs idées. Les Bills forment un groupe de citoyens qui ne reconnaissent pas l’autorité du gouvernement fédéral. Ils ne paient pas d’impôts ni de taxes, n’ont pas de permis de conduire, pas de plaques ou de fausses plaques d’immatriculation des voitures . Ils sont armés et prônent le droit à toutes les libertés individuelles tout en n’acceptant aucune obligation imposée par l’état. Ils sont aussi racistes et antisémites. Joe, blessé par l’un d’eux, puis soigné et rétabli, va représenter un danger : s’il est libre il peut parler et les trahir, sinon il devra s’intégrer au groupe. Les Bills s’accommodent d’une contradiction : ils ne veulent se plier à aucune contrainte mais ils en imposent aux autres.

Le roman est centré sur le personnage de Virgil Caudill/Joe Tiller. C’est un homme simple. Il n’est ni exigeant ni ambitieux, il préfère la tranquillité. Il exerce le métier d’éboueur au Kentucky. Il aime la nature environnante, il apprécie son environnement de bois de collines, de rivières. Jeune, il a été sous l’influence et la domination d’un frère plus brillant et plus exubérant que lui. Ce frère a été tué, on attend maintenant de lui qu’il fasse ce qui doit être fait. S’il n’est pas le plus futé des hommes, Virgil est tenace, coriace et pas facilement influençable.

Du Kentucky au Montana. Deux états d’un même pays mais avec de grandes différences. Virgil a cru au début que les deux états se ressemblaient mais il s’est vite aperçu que si les paysages étaient différents, les gens l’étaient encore plus.

Comme le personnage principal, l’écriture est simple, épurée, dénuée de fioritures stylistiques. Il y a de nombreuses et belles descriptions des paysages du Kentucky et du Montana.

Le bon frère est un beau roman qui sous l’apparence de la simplicité, aborde avec subtilité les thèmes de la liberté de choix, de la culpabilité, du devoir à accomplir mais aussi les différences profondes entre états d’un même pays, sur fond de grands espaces magnifiquement décrits.

Extrait : 
Tout à coup, il sut qu’il ne l’avait jamais aimée. Au plus fort de ses sentiments dominait la sympathie. Ils étaient ensemble parce que la communauté attendait d’eux qu’ils le soient. Il comprit soudain qu’il avait passé sa vie à suivre des schémas que d’autres avaient conçus pour lui.
Il éprouva les premiers miroitements, encore bien légers, d’une vraie liberté, une sensation qui lui ficha la trouille. À un feu rouge, il regarda par la vitre d’un bar. De l’autre côté de la rue, il y avait un autre bar. La ville, c’était l’endroit où se rendaient les gens quand ils n’avaient pas d’autre endroit où aller. Ils buvaient, ils aimaient, ils se battaient, et Joe aurait aimé être l’un des leurs, mais il savait qu’il ne le serait jamais. Il était fatigué d’essayer d’être comme tous les autres.

Collines du Kentucky

Ma note : 4.3 out of 5 stars (4,3 / 5)

 

 

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