Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 1974
(Open Season)
Date de publication française : 1977 (Éditions Hachette) et 2020 (Archipoche)
Traduction : Michel Ganstel
Genre : Thriller
Personnages principaux : Ken, Greg et Art, chasseurs spéciaux – Un mystérieux vengeur
Alicia a été violée. Le procureur dissuade ses parents de porter plainte. Elle n’aboutirait à rien, les trois coupables représentent la fine fleur de la jeunesse américaine dans leur ville de Ann Harbor dans le Michigan. Ce sont des garçons de bonne famille, de bons élèves. Leur parole prévaudrait sur celle de la modeste Alicia. Des années plus tard, les trois violeurs, Ken, Greg et Art ont prospéré, fondé une famille. Ils ont de belles épouses, des enfants magnifiques, de jolies maisons. Ils ont pris l’habitude, tous les ans, d’aller passer quinze jours dans la région des lacs, dans le nord du Michigan où ils possèdent un pavillon de chasse. Ils pratiquent une chasse spéciale : ils enlèvent un couple, homme et femme, s’amusent un peu avec eux puis les relâchent en pleine nature en leur laissant un peu d’avance avant de se lancer dans une traque mortelle et une mise à mort. En toute impunité. Mais cette année, quelqu’un d’autre les guette, un chasseur aussi, prudent et méticuleux. Son gibier à lui c’est les trois amis.
Ce livre a été publié la première fois aux États-Unis en 1974 et en France en 1977. Cette année, il a été réédité par Archipoche. Plus de quarante après, il n’a pas pris une seule ride.
L’auteur met d’abord en scène ce trio d’amis depuis leur enfance. L’impunité et la réussite sociale leur ont procuré un sentiment de toute-puissance. Leur vie familiale et professionnelle est satisfaisante, mais elle manque de piquant, d’adrénaline. C’est ce qu’ils vont chercher dans leur séjour annuel au pavillon de chasse situé dans une région isolée et peu fréquentée en cette saison d’automne. Alors les bons bourgeois, quadragénaires, pères de famille et maris exemplaires se transforment en prédateurs cruels et sadiques, avant de reprendre leur vie pépère jusqu’à l’année prochaine. Ils ne le savent pas, mais cette année quelqu’un d’autre est là, aux aguets. Quelqu’un qui les connaît très bien, qui est au courant de leurs habitudes. Cette fois, ils vont vraiment avoir des sensations fortes !
Ce roman n’est pas qu’un thriller avec de l’action, de la tension et du suspense. Ces ingrédients sont bien présents, mais en plus l’auteur fait aussi une description subtile des personnages et des liens qui les unissent. Il décrit comment Alicia, la jeune fille violée, se retrouve seule au monde, abandonnée de tous. Il montre aussi les frustrations et les rêves qui habitent le couple adultère qui servira de proie aux chasseurs. Et si les membres du trio de violeurs meurtriers ont l’air de s’entendre parfaitement, en réalité chacun méprise l’autre. Ce sont surtout leurs turpitudes qui les unissent. Avec leurs épouses, ce n’est pas non plus le grand amour, leur attachement est basé sur le paraître et l’hypocrisie.
Le livre a été adapté au cinéma par Peter Collison sous le titre Open Season aux États-Unis et en France sous le titre La chasse sanglante. À sa sortie en France il a été interdit aux moins de 18 ans pour incitation à la violence.
La chasse est ouverte est un excellent thriller. C’est aussi une description décapante d’une certaine bourgeoisie américaine déliquescente.
Extrait :
C’était vrai, et ils restèrent tous deux pensifs. Le mystère du tireur sans visage rendait leur position encore plus angoissante. Soudain, chez eux, une arme inconnue avait fait entendre sa voix, et tout leur univers se trouvait sens dessus dessous. Un instant plus tôt, ils étaient bien en vie, joyeux, s’amusant, profitant de l’excitation de leur chasse particulière. Ils avaient déjà liquidé Martin, ils venaient de liquider Nancy. Ils allaient pouvoir se reposer, avec la satisfaction du devoir accompli, en arrosant leur succès avec de grandes rasades de bourbon. Ce soir, ils allaient peut-être faire une partie de Monopoly, un jeu bien délassant. Demain, ils allaient recommencer une de leurs bonnes parties de chasse.
Mais, désormais, ils n’étaient plus des chasseurs. Ils étaient devenus le gibier.
Niveau de satisfaction :
(4,4 / 5)