Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2022 (Hugo Thriller)
Genre : Thriller
Personnage principal : Joy Morel, adjudante
L’idée de départ est prometteuse : exiler sur une île déserte perdue dans l’océan une bande de criminels en tout genre irrécupérables: sadiques, cannibales, tueurs en série, dangereux psychopathes, et tout ce que vous pouvez imaginer encore pire. Ce sont eux qui déterminent leur mode vie et qui fixent les règles. Ils sont une vingtaine; de nouveaux arrivent, mais des anciens meurent. On en est venu à tenter cette expérience parce que les gens n’ont plus tellement confiance aux prisons qui augmentent les risques de récidives en accroissant les facteurs criminogènes. L’adjudante Joy Morel manifeste souvent son manque de confiance au système judiciaire en général, pénitentiaire en particulier. C’est pourquoi elle est choisie comme une des deux policières pour la mission, l’autre étant le gendarme Hoche, avec qui elle ne s’entend pas très bien.
La mission, qu’ils n’ont pas le choix d’accepter parce qu’ils sont maintenant au courant d’un important secret d’État, consiste à être expédié sur cette île, en tant que criminels, dans le but de retrouver une psychocriminologue, Chloé, et son garde du corps, le policier Rod, envoyés dans cet enfer pour tracer un compte rendu de la situation. Depuis dix semaines, on a essayé de les exfiltrer à quelques reprises, mais ils ne sont jamais présentés aux rendez-vous prévus pour cette opération.
Joy n’apprécie pas le système de justice mais estime encore moins cette expérience d’île des damnés, où tout espoir de réhabilitation est abandonné. Ce n’est pas la moindre de ses contradictions qui risque de faire échouer la mission. Avec Hoche, ils rencontrent les criminels les moins recommandables, risquent d’y laisser leur peau, et finissent par retrouver Chloé et Rod; mais ils sont loin d’être sortis du bois.
L’idée est bonne, mais c’est difficile d’entrer dans le jeu. Les scènes de violence se multiplient mais on y croit difficilement parce que c’est trop caricaturé. Les personnages qui représentent les méchants sont succinctement décrits, sauf Trip, le leader apparent, qui n’a pourtant rien de terrifiant ou de charismatique. Les policiers sont décrits plus en détail, surtout Joy, de façon contrastée : le calme Hoche et l’énervée Joy, la calme Chloé et l’intrépide Rod. Le centre, c’est Joy, et c’est difficile de la trouver attachante. C’est pourquoi aussi les invraisemblances sont manifestes. Et l’intrigue manque un peu de subtilité.
Extrait :
– Tu m’as demandé pourquoi je te faisais confiance tout à l’heure. Et toi ? Pourquoi tu tiens tant à m’aider ?
– Je ne sais pas. Pour me racheter peut-être.
– Te racheter de quoi ? insiste Joy en essayant de capter son regard.
– Cherche pas, la rabroue Antonin. Bientôt tu seras loin d’ici, c’est tout ce qui compte.
– Parce que tu crois savoir ce qui compte pour moi ?
– Ne joue pas à ça avec moi. On ne se connaît pas, je compte aussi peu pour toi que toi pour moi et c’est très bien comme ça.
Joy se sent blessée par cette réplique. Elle en veut à ses émotions d’être aussi déréglées. Cet homme a raison. Rien ne le relie à elle. Alors pourquoi a-t-elle envie, si ce n’est besoin, d’en savoir plus sur lui ? Pourquoi aimerait-elle, au fond d’elle, qu’il s’intéresse à elle, qu’il réitère sa tentative de rapprochement ? Pourquoi l’idée de quitter l’île lui paraît-elle subitement encore plus inenvisageable et lui promet-elle un goût d’inachevé ?
Niveau de satisfaction :
(3,5 / 5)