Pour seul refuge – Vincent Ortis

Par Raymond Pédoussaut

Date de publication originale : 2019 –
La Bête Noire

Genres : Thriller, roman noir
Personnages principaux : Ted Cortino, policier – Edward McCarthy, juge – Alan Marocco, jeune délinquant

Sur une route déserte du Montana, sous une pluie battante, Ted Cortino, policier, porte secours à un automobiliste en panne qui est juge. Les deux hommes se réfugient dans une cabane de bûcheron, en pleine montagne enneigée du Montana, à plus de deux mille mètres d’altitude. Le juge veut repartir le plus tôt possible car il doit assister son fils impliqué dans une affaire de drogue. Mais le policier le retient sur place plusieurs jours prétextant l’enneigement de la route. En fait le policier a un autre plan concernant le juge et la façon de quitter le refuge. Un plan longuement et minutieusement mûri.

L’intrigue de ce roman est comme le plan du policier Ted Cortino : méticuleusement élaborée. Le début du récit nous donne une vision réduite et même biaisée des événements. Puis au fur et à mesure que les pièces du puzzle s’emboîtent, le point de vue évolue et donne une nouvelle compréhension de l’histoire, totalement différente de celle du départ. Une utilisation habile de faux-semblants maintient jusqu’à la fin les changements de perspective. C’est astucieusement réalisé et c’est indéniablement le point fort de ce thriller.

Une autre qualité de ce polar est la mise en place d’un décor aussi impressionnant que dangereux. Une cabane perdue au milieu de la montagne, puis une randonnée obligée de cinq jours dans la neige et la glace, avec la présence inquiétante des loups et des ours. Dans cet environnement hostile, un jeu de piste pervers contraint deux hommes que tout oppose à collaborer pour rester en vie. S’ils s’affrontent, ils meurent car chacun détient seulement une partie des informations nécessaires pour mener à bien leur expédition.

Il se dégage de ce roman une morale : il faut se méfier des idées préconçues, les gens ne sont pas forcément ce qu’ils paraissent. D’ailleurs l’auteur dédie son œuvre « À tous ceux qu’on prend pour des Alan Marocco et qui ne sont que des enfants malheureux. » (Ici le nom d’Alan Marocco représente un délinquant violeur et assassin).

À la lecture de ce thriller on pourrait penser que l’auteur est américain, il en a le style et le décor est celui des États-Unis. Mais non ! Vincent Ortis est bien français. C’est son premier roman. Il a reçu un bel encouragement : le Grand Prix des Enquêteurs pour sa première édition.

Extrait :
— T’as tout compris, monsieur le juge. Tu as cinq jours pour te faire une idée de la personnalité du prévenu. Hors de tout ce qui peut perturber ton jugement. Et, au bout des cinq jours, tu rendras ton verdict. On est au Montana, c’est pas à toi que je vais apprendre que c’est au juge de décider de la sentence.
— C’est dément !
— Tu m’insultes et tu me déçois. Tu ne perçois pas la richesse de l’expérience ? Je ne veux de mal à personne, ni à toi ni à lui. Je veux que justice soit rendue. Or je doute tellement de la justice. J’aimerais tant avoir tes certitudes, le juge ! Je suis flic, j’ai prêté serment. Je ne peux pas toucher à un de vos cheveux, sauf en cas de légitime défense, bien entendu.
— À deux, on pourra s’entraider.
— Je l’espère ! Ce sera une obligation, même. Car si monsieur le juge a le trajet dans sa tête, c’est la crapule qui a les caches des étapes dans la sienne. Vous aurez besoin l’un de l’autre : c’est pour ça que je ne vous donne pas de cartes, monsieur le juge. Il serait capable de vous tuer pour vous les prendre.

Niveau de satisfaction :
4 out of 5 stars (4 / 5)

 

 

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