Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2025
– Le Cherche Midi
Genres : Sociétal, thriller
Personnage principal : Arnaud Rivelle de la Chausse, prodige de l’intelligence artificielle
Arnaud, expert en intelligence artificielle, prépare une guerre. Constatant que l’humanité fait face au plus grand péril de son histoire et que personne ne semble en prendre la pleine mesure, il a choisi de trouver une solution radicale à l’urgence climatique. Il a décidé de faire tomber le système économique, ni plus ni moins. Mais voilà que lors d’une fête entre gens de la tech, il remarque Cho, une jeune asiatique à forte poitrine. Dès lors, il va développer une obsession pour cette fille. Il va détourner les moyens qu’il a mis six ans à développer pour tout savoir d’elle. Il va utiliser le Général, une unité d’intelligence artificielle qui coordonne plusieurs autres sous unités spécialisées, pour mettre en place un plan machiavélique afin de mettre Cho dans son lit. Passer d’un projet de créer un chaos mondial à celui de simplement séduire une fille ne paraît pas si difficile, mais pas totalement satisfaisant non plus à plus long terme.
Le roman est centré sur Arnaud, un génie de l’intelligence artificielle. Il est l’enfant unique d’une famille riche, les Rivelle de la Chausse. Loin de profiter de l’argent de son père, Arnaud n’a que mépris pour ses parents, il les déteste même et ne perd pas une occasion de les faire enrager. Il n’a pas besoin de la fortune de sa famille pour acheter tout ce qu’il veut : sa connaissance de l’intelligence artificielle lui permet de monter des arnaques lucratives et il sait jongler avec les cryptomonnaies. Arnaud n’exècre pas que ses parents, c’est la société tout entière qu’il hait, tout le monde sauf Cho, mais on ne peut pas dire qu’il soit amoureux d’elle. Pendant un certain temps il est simplement hypnotisé par ses seins et son fessier rebondi, ensuite il l’a trouve idiote, complètement accro aux réseaux sociaux.
Un tel personnage sans scrupules qui déteste tout le monde a la dent dure envers les autres humains. Rien ni personne ne trouve grâce à ses yeux. Tour à tour, tous les aspects de la société sont décriés : la politique, le consumérisme, les médias, les journalistes, les réseaux sociaux, la bourgeoisie, les riches, le complotisme … Le langage est crû, parfois grossier, il exprime de façon explicite la façon de penser du narrateur. C’est féroce, cruel et cynique, mais tellement bien observé ! La masse des critiques n’est pas du tout plombante, au contraire on y trouve beaucoup de vigueur, de tonicité et une pincée d’humour noir qui provoquent souvent le sourire.
À la fin du roman l’auteur développe une pensée plus profonde concernant l’évolution de l’humanité. Il explique comment le progrès technique permet de dépasser notre condition de mortel et ainsi, à la pesanteur de la condition humaine succède l’élasticité d’une condition artificielle. Il est à noter que les conclusions de Paul Monterey rejoignent celles de Giuliano Da Empoli dans Le Mage du Kremlin : tous les deux prévoient la prise de pouvoir des machines intelligentes et l’avènement d’un maître qui ne serait qu’un gigantesque organisme artificiel.
Révélateur de la bêtise humaine, La Condition artificielle est un roman choc et brillant. Il est marqué par un pessimisme certain, mais la profondeur d’analyse, l’acuité et la férocité de l’exposé des comportements humains rendent ce livre captivant.
Extrait :
J’avais longtemps cherché un moyen de provoquer ce choc de civilisation salutaire. J’avais créé l’arme parfaite en la personne du Général mais avais longtemps été incapable de comprendre comment orienter au mieux sa formidable force de frappe. Ironiquement, c’étaient mes triviales mésaventures avec Cho qui m’avaient permis de trouver comment faire. Rien n’arrive jamais vraiment par hasard. Pour faire s’écrouler l’édifice, il fallait parier sur la bêtise humaine. C’était aussi simple que cela. Les institutions, les États, les grandes entreprises ou les banques avaient mis en place des protections qui les rendaient inattaquables. Les cerveaux humains, en revanche, chaque jour plus perméables à la désinformation et la manipulation générées par une nouvelle malveillance virtuelle, étaient plus vulnérables que jamais.
Niveau de satisfaction :
(4,5 / 5)
Coup de cœur