Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2023 (Wolfskinder)
Date de publication française : 2024 – Gallmeister
Traduction (allemand) : Brice Germain
Genre : Roman noir
Personnages principaux : Smilla, stagiaire journaliste – Jesse, garçon de 17 ans – Edith, sauvageonne de 9 ans – Rebekka jeune femme enlevée
Au fond d’une profonde vallée se trouve le village d’Almenen. Au-dessus de ce village, dans les montagnes, il y a le hameau de Jakobsleiter. La vie y est rude et âpre, ses habitants sont méprisés et rejetés par ceux, plus civilisés, du village. Rebekka, jeune fille de 16 ans, rêvait d’une vie meilleure loin de ce triste hameau. Un jour elle a disparu. Smilla, stagiaire dans une chaîne de télévision locale, ne s’est jamais remise de la disparition de sa meilleure amie Rebekka car elle est convaincue que son amie a été enlevée alors que la police n’a même pas enquêté. Elle fait le rapprochement avec les 31 autres femmes qui se sont volatilisées de la même façon. De retour dans la région après 10 ans, Smilla va déterrer les secrets de Jakobsleiter.
Ce roman choral raconte l’histoire de six points de vue différents. Ceux d’une journaliste obsédée par la disparition de sa meilleure amie, d’un garçon amoureux de la disparue, d’une jeune sauvageonne qui connaît la montagne comme sa poche, d’une institutrice, d’un faux prêtre et enfin celui de la disparue elle-même. Cette grande diversité de façons de voir donne au roman de la vivacité et évite toute monotonie. Elle permet également de présenter toute une galerie de personnages aussi variés qu’attachants.
– Edith, fille de 9 ans, ne parle pas, elle est sauvage, dégourdie et très futée. Elle aime la montagne et le silence – Jesse est un adolescent qui a apprivoisé un loup. Petit à petit, il va comprendre l’histoire de son hameau et se rebeller – Smilla ne cesse de penser à son amie d’enfance disparue. Elle a une idée fixe sur la question et c’est elle qui va donner le coup de pied dans la fourmilière. D’autres personnages font aussi leur apparition : un prêtre pas très catholique qui entretient la phobie de l’antenne radio qu’on vient d’installer, une institutrice déterminée à régulariser l’enseignement dans ce coin perdu, un maire protecteur et un policier amical et compréhensif.
L’intrigue est consistante et relativement complexe, elle entretient un bon suspense avec un certain nombre de surprises qui pimentent le récit. Le dénouement paraîtra peut-être un peu téléphoné à ceux qui ont l’habitude de lire des polars. L’ambiance du hameau reculé de montagne avec ses mystères et ses secrets est particulièrement bien rendue. Des touches d’humour par-ci par-là éclairent la noirceur de l’histoire.
Les enfants loups est un excellent roman, noir et lumineux à la fois.
Extrait :
Je hoche la tête, hésitante. J’ai pas le temps en réalité. Mais je sais que Freigeist est très important pour Jesse. Et qu’en plus, ce ne serait pas une mauvaise chose du tout que quelqu’un le surveille et le dresse un peu pour qu’il ne mange pas tout le temps les chèvres du papa de Jesse.
— Ensuite, je vais seul en classe et je passe ici après les cours pour te récupérer, qu’est-ce que tu en dis ? Et les après-midi où mon père n’a pas besoin de moi, je te montre ce qu’on a étudié, pour que, toi aussi, tu aies école. Ici, sous les arbres.
Il montre du doigt autour de lui. La lumière du soleil tombe à travers les branches et sur son visage. Jesse a un beau visage. Tout y est doux et lisse. Tout le contraire de mon papa. Voilà qu’il m’offre carrément le loup, je me dis, et je me rapproche un peu de lui.
C’est toujours différent de recevoir un cadeau que de devoir le prendre soi-même. Quand on le prend soi-même, ça chatouille dans le ventre. Mais quand on le reçoit, ça chatouille le cœur.
Niveau de satisfaction :
(4,4 / 5)