Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2022 (Vigil Harbor)
Date de publication française : 2023 – Gallmeister
Traduction (américain) : Sophie Aslanides
Genres : sociologique, psychologique
Personnages principaux : Quelques habitants de Vigil Harbor
Vigil Harbor est une ville construite sur une presqu’île qui s’avance dans l’océan Atlantique sur la côte du Massachusetts. C’est un havre de paix et d’immobilisme. Ses habitants forment une communauté privilégiée implantée là depuis plusieurs générations. Peu ouverts sur le reste du monde, les autochtones finissent par se ressembler. Leur douce quiétude est bouleversée par les tempêtes et par les attentats qui font l’actualité.
À Vigil Harbor les gens s’estiment protégés des dangers du monde extérieur. Leur ville est pour eux une garantie de sécurité. Leurs jeunes enfants ne vont pas à l’école publique qu’ils appellent avec dédain Le Broyeur. L’école est assurée à tour de rôle par les parents, dans leur maison, et ils sont payés pour cela. Le Yacht Club est très actif et organise régulièrement des réunions et des fêtes auxquelles participent de nombreux habitants. Celestino, le paysagiste originaire du Guatemala, est le seul à ne pas avoir la peau blanche et bien que naturalisé américain depuis des années il craint encore d’être expulsé. Pourtant, les temps perturbés finissent par arriver à Vigil Harbor. Cela commence par une vague de divorces inédite. Deux membres bien connus du Yacht Club ont décidé de quitter épouse et mari pour partir vivre ensemble dans une communauté survivaliste. C’est un choc pour la population. Puis arrivent deux étrangers : une soi-disant journaliste s’intéresse particulièrement à Austin, architecte de renom avec qui elle semble avoir un compte à régler, et un voyageur de passage au charme envoûtant tente de renouer des liens de jeunesse avec Celestino. L’influence de ces deux arrivants va rompre la belle sérénité de la ville.
Les habitants de Vigil Harbor qui avaient cru créer dans leur ville un cocon protecteur des violences du monde ont été rattrapés par la brutalité de la société actuelle. Les tempêtes évoquées par le titre français ne sont pas que des phénomènes météorologiques, il s’agit aussi des attentats terroristes qui font des victimes et maintiennent l’angoisse. Angoisse omniprésente et peur de l’avenir sont ce qui caractérise ce petit monde vivant sur des valeurs du passé.
L’histoire est racontée par huit habitants de Vigil Harbor qui prennent tour à tour la parole et exposent leurs sentiments et leurs points de vue. L’autrice s’attache surtout à la psychologie des personnages et à leur ressenti, il y a peu d’action, c’est un roman d’ambiance qui n’est ni palpitant ni accrocheur. La vie ordinaire de ces gens repliés sur eux-mêmes engendre une certaine monotonie et même un peu d’ennui, le roman m’a paru alors lent et long, même s’il se lit assez facilement avec la présence de personnages variés analysés finement.
Extrait :
Cette ville, où on rencontre plein de gens qui prétendent être de la treizième génération – comme s’il y avait de quoi se vanter quand on traîne depuis toujours à l’endroit où ses ancêtres diluviens se sont installés par le plus grand désespoir – cette ville donne l’impression d’être entourée d’isolant, ou plutôt d’un halo de protection, bien qu’on ne soit qu’à quarante-cinq kilomètres de la grande ville. Les gens qui habitent ici ont tendance à ne jamais vraiment partir – ou ils reviennent, même après avoir juré qu’ils ne le feraient jamais. (Connie par exemple.) Mes parents sont un cas inhabituel : ni l’un ni l’autre n’a grandi ici. Elle est un peu comme un ruban de Moebius, cette ville.
Niveau de satisfaction :
(3,8 / 5)