Ma mémoire assassine – Kim Young-ha

Par Raymond Pédoussaut

mamemoireassassineDate de publication originale : 2013 (Sarinja eui kieokbeop)Kimyoungha
Date de publication française : 2015 (Philippe Picquier)
Genres : Roman noir, Thriller
Personnage principal : Kim Beyoung-su, ex-tueur en série atteint d’Alzheimer

Kim Beyoung-su est un ex-tueur en série qui a liquidé plusieurs dizaines de personnes sans le moindre remord mais avec beaucoup de plaisir. Suite à un accident de voiture, vingt ans auparavant, il a été blessé au cerveau et il a ainsi perdu le goût du meurtre. Il est devenu un homme ordinaire depuis vingt ans. Il a maintenant 70 ans. Mais aujourd’hui, un type du même genre que lui assassine des femmes dans son village. Sa fille adoptive, dont il a tué les parents, est menacée. Lui, a repéré le tueur qui est en plus le fiancé de la jeune fille. Pour la protéger il lui faut reprendre du service : il doit tuer le tueur. Il prépare donc un nouvel assassinat, par obligation cette fois et non poussé par les pulsions d’autrefois. Ce ne serait pas un problème s’il ne commençait pas à perdre la mémoire, atteint d’Alzheimer dont les symptômes sont de jour en jour de plus en plus handicapants. Alors il s’organise : il tient un journal dans lequel il note ce qu’il fait et ce qu’il doit faire. Il enregistre aussi les conversations avec un magnétophone fixé autour de son cou. Ces précautions seront-elles suffisantes pour combler les trous de mémoire afin de mener à bien son projet ?

Les polars sur les tueurs en série sont légion, mais un tueur en série frappé d’Alzheimer, ce n’est pas courant. Le gros problème de ce tueur n’est pas d’assassiner, c’est de ne pas oublier qui il doit occire. Ce qui compte pour lui c’est la mémoire du futur c’est à dire le souvenir de ce que l’on doit faire dans l’avenir. Par exemple il ne doit pas oublier qu’il doit liquider le type qui menace sa fille. Or c’est précisément ce que les malades d’Alzheimer oublient en premier : ce qu’ils doivent faire. Dans ces conditions ce n’est pas évident pour notre homme de planifier un meurtre. L’auteur nous expose toutes les difficultés rencontrées par cet étrange tueur et les astuces qu’il met en œuvre pour les contourner. Il montre la confusion dans laquelle est plongé notre homme qui devient progressivement incapable de saisir toute notion de temps et de faire la différence entre un monde réel et l’au-delà. Cela pourrait être pénible et même carrément plombant mais l’humour noir et la dérision allègent considérablement le récit. Une fin inattendue, qui réécrit le scénario, ajoute un intérêt supplémentaire à ce roman singulier.

Kim Young-ha doit se sentir particulièrement concerné par le processus de la perte de mémoire : il a lui-même perdu tout souvenir à l’âge de 10 ans, suite à une intoxication au gaz.

Ma mémoire assassine est un roman original avec un côté pédagogique sur une maladie terrible. On vit de l’intérieur la souffrance du narrateur. C’est traité avec suffisamment de légèreté et d’humour pour rendre finalement le livre bien agréable.

Extrait : 
Je n’ai pas peur de la mort. Je ne peux pas empêcher ma mémoire de s’effacer. Le moi qui aura tout oublié ne sera plus le moi d’aujourd’hui. Si je ne parviens pas à me souvenir du moi d’aujourd’hui, même si la vie après la mort existe, le moi dans l’au-delà ne sera pas moi. Alors je me fous de l’après-vie. Une seule chose me préoccupe aujourd’hui, tout faire pour que Eun-hee ne se fasse pas assassiner, avant que toute ma mémoire n’ait disparu.
C’est mon karma. Et mon unique lien avec la vie.

Ma note : 4 out of 5 stars (4 / 5) mamemoire-amb

 

 

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2 réponses à Ma mémoire assassine – Kim Young-ha

  1. Sandrine dit :

    Oui, singulier mais pas trop. J’ai souvent du mal avec la littérature asiatique, qu’elle soit coréenne ou autre. Alors j’essaie de choisir des romans a priori pas trop distants de moi, par leur sujet par exemple, ou leur genre. Un roman noir comme celui-là me paraissait plus facile d’accès qu’un drame psychologique, parce que je fréquente le genre. Et effectivement, aussi grâce à l’humour, c’est un roman tout à fait abordable.

    • Ray dit :

      Je ne connais pas bien la littérature asiatique. Je suis tombé sur ce roman en cherchant un bouquin sortant un peu des sentiers battus. Je ne le regrette pas.

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