Chaîne de glace – Isabelle Lafortune

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 2022 (XYZ)
Genre :
Noir
Personnage principal :
Émile Morin, Directeur des enquêtes criminelles (SQ)

Isabelle Lafortune aime bien les gens de la Côte-Nord. Pas surprenant qu’on découvre un cadavre près de Havre-Saint-Pierre, sur le site de la centrale hydroélectrique La Romaine : un Chinois dont les lèvres ont été cousues. Dans ses vêtements, on a glissé un message incitant le monde (« bandes d’abrutis ») à se méfier de l’Empire du Milieu qui « vole et pollue la planète et notre territoire ». Ce Chinois, c’est Taï Zhan, vice-président et directeur des opérations et du marketing de la compagnie BitChain. Or, BitChain est une division de l’important conglomérat PowerChain, dont le fondateur est le père de Taï Zhan. Les rapports entre cette compagnie chinoise et Hydro-Québec ne sont pas innocents.

Le directeur des enquêtes criminelles, Émile Morin, son ami Giovanni Celani et la profileuse Camille Labelle mèneront l’enquête. Le père de Taï Zhan, Taï Lian, entouré d’hommes de main redoutables, veut aussi savoir qui a tué son fils. Il soupçonne un cadre important d’Hydro-Québec, Jonathan Dumont, avec qui son fils entretenait des relations pas très claires. Et Dumont disparaît justement. Et on le retrouve bientôt assassiné.

Pendant ce temps, Sam, l’ami de Giovanni et Émile, a été enlevé par Gary Lindman, le grand actionnaire de la Métald’Or, compagnie sur laquelle Émile avait enquêté quelques années plus tôt. Sam, Gary et Margaret, spécialiste des arts martiaux, qui avait été la garde du corps de Taï Zhan, sont réfugiés dans un bunker souterrain et suivent les événements. Sam craint pour sa vie, même s’il ne comprend pas très bien ce qu’il fait là, et c’est Gary qui semble surtout sur le point de disparaître. Émile enquête en même temps sur cette disparition.

Puis, Angelune, la fille d’Émile qui la couve comme un bébé, est en train d’organiser avec son ami Karl, un écolo radical, une manifestation à Havre-Saint-Pierre. Émile est d’autant plus inquiet que, pour lui, Karl est un faux-jeton, qu’une empreinte de bottes qu’Angelune prétend avoir égarées a été retrouvée près du corps de Taï Zhan, et qu’une bombe éclate au moment de la manifestation.

Deux éléments sont introduits, peut-être pour nous aider à y voir plus clair, peut-être pas : d’abord, les dates indiquées au début de plusieurs chapitres, et qui désignent plusieurs retours en arrière; puis, les citations et les références à Spinoza dont la compréhension n’est pas aisée. Ajoutés à plusieurs fausses pistes et à un grand nombre de personnages, ces éléments ne rendent pas la partie facile pour le lecteur.

L’auteure répète son amour pour la région et les habitants où l’action se déroule, mais le roman est moins sociologique que le précédent. On se préoccupe davantage des crimes et des recherches pour éclaircir les situations. La thématique elle-même des vols d’informations techniques et scientifiques dont est victime Hydro-Québec est bien d’actualité. Mais l’essentiel se perd dans un fatras de détails qui déroutent enquêteurs et lecteurs. Parmi ces diversions, les sombres introspections de nos enquêteurs et leurs sentiments d’hommes immatures nous empêchent d’embarquer facilement dans cette histoire.

Extrait :
L’énervement de même que l’intolérance sont des émotions qui s’entretiennent bien. C’est comme une drogue : plus on critique, plus on a envie de critiquer. Ça fait du bien sur le coup, on s’exprime, ça donne l’impression d’avoir compris le sens de l’existence, de mettre le doigt sur quelque chose, mais cette illusion ne dure qu’un moment. Je crois que c’est l’expression de quelque chose qui nous échappe et peut-être également le reflet de la déception qu’on peut éprouver par rapport à soi, sans doute rehaussée par l’inéluctable incapacité à façonner notre monde selon nos idéaux.
Je ne jetterais pas la pierre à Émile : j’étais contaminé par cette morosité aussi. Nous avons assurément besoin d’un peu plus de lumière dans nos vies et je n’étais pas exactement certain que l’accumulation de morts s’avérait une bonne thérapie.

La Romaine

Niveau de satisfaction :
3 out of 5 stars (3 / 5)

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