Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2023 – Le mot et le reste
Genres : Roman noir, grands espaces
Personnage principal : Une femme qui vit seule au milieu de la nature
Une femme vit seule en forêt. Elle s’est installée dans une grotte à flanc de falaise. Elle vit de pêche, de chasse, de cueillette et de la culture de quelques légumes. Elle est en harmonie avec la nature, elle est bien. Mais aujourd’hui elle est inquiète et sur ses gardes : il y a eu une détonation aux confins de son territoire. Ses craintes sont confirmées quand elle trouve un de ses pièges vide, quelqu’un a prélevé la proie. Autre indice inquiétant : elle a relevé deux empreintes de chaussures différentes. Deux intrus ont pénétré dans son espace. Le danger est là. Elle se prépare à l’affronter.
La femme devenue sauvage s’astreint à une discipline de fer, ses journées sont strictement planifiées, elle se fixe des objectifs : la nourriture pour assurer sa subsistance, le guet pour sa sécurité, l’écriture pour son humanité, le yoga et l’hygiène pour la santé. Elle a édicté une loi – sa loi. Elle s’efforce de s’y tenir et se punit quand elle ne la respecte pas. Alors quand elle s’aperçoit que des humains ont pénétré son environnement, elle se sent menacée, elle part en guerre pour éliminer cette présence malvenue.
Cependant cette femme n’est pas une virago, une furie incontrôlable. Dans une autre partie de sa vie, elle était épouse et mère. Elle est cultivée, elle philosophe, médite et écrit son histoire. Elle veut laisser une trace : « Le temps de raconter est venu. S’il m’arrive malheur, au moins mes mots seront là quand je ne serai plus. » C’est à travers ses écrits que nous découvrons progressivement les drames qui l’ont amené à fuir la civilisation.
L’auteur nous décrit avec tant de précision et de poésie la vie sauvage de cette femme que nous en sommes presque à envier son mode de vie spartiate et ascétique mais vivifiant. Elle a installé son chez-soi douillet dans une grotte dont elle a fermé l’entrée par un mur et une porte. Elle est à l’abri et au chaud même pendant le froid et les intempéries. Un feu de bois l’éclaire et la réchauffe. Elle lit et écrit. Elle se concocte des recettes à base de farine de glands, de noix, de légumes, d’herbes, de poisson et d’un peu de viande provenant de ses pièges. Aucun gaspillage, juste le strict nécessaire. Une vie saine et stimulante, réduite à l’essentiel. Pas de kilos en trop ! Sobriété et respect de la nature. La belle vie ! Mais l’arrivée d’autres humains va remettre en cause sa tranquillité. Des éléments de sa vie antérieure vont réapparaître à son grand désespoir.
La femme paradis est un beau roman, sombre, sobre, intense et plein de poésie, dans lequel la nature tient un rôle majeur.
Extrait :
Cette construction me redonne envie de vivre. J’ai un endroit à défendre. Mes journées débordent de projets. Mille tâches à effectuer. Mon cerveau résout des problèmes inédits. Mes mains sculptent de nouvelles matières. Mon corps change. Il devient tonique à force d’exercices et de bains glacés. Les capitons de mes fesses et de mes cuisses fondent. Mes jambes galbées me portent loin, mes abdominaux et mes biceps saillent sous la peau. Je dors des nuits courtes. Mon esprit se conforme à mon évolution physique. Ma volonté s’affermit. Les plaintes et les pensées négatives s’évanouissent, la peur aussi. Je m’aime à nouveau.
Niveau de satisfaction :
(4,4 / 5)
Ah oui, j’avais déjà repéré ce titre (de mémoire chez La petite souris), et je vois que tu confirmes qu’il est à lire…
Oui, je pense que c’est un bon roman, assez étrange, sombre et poétique. Il sort des sentiers battus. Tu ne seras pas déçue.