Par Raymond Pédoussaut
Date de publication originale : 2023 – Albin Michel
Genres : Enquête, thriller
Personnages principaux : Lottie Sandvik, policière dans le Swalbard (Norvège) – Nils Madsen, journaliste à Oslo
Lottie Sandvik est policière à Longyearbyen, la dernière cité avant le pôle Nord. Dans cette ville tranquille, son ordinaire au travail consiste à traiter un vol ou une bagarre de poivrots. Mais ce jour, elle est appelée sur une affaire plus importante : elle doit constater la mort d’une femme attaquée par un ours blanc. La victime est une jeune femme doctorante en biologie arctique. Son corps a été retrouvé près d’un cachalot qui s’est échoué là quelques mois auparavant. On pense qu’elle était en train de faire des prélèvements sur l’animal marin quand l’ours l’a attaquée. Chose étrange : elle n’avait pas de fusil alors que la sécurité impose de porter une arme hors des villes, à cause de la présence des ours dans la région. Lottie ne s’en tient pas aux apparences, elle va creuser cette affaire qui lui paraît bancale.
Dans les îles Lofoten, à l’hôpital de Tromsø, Nils Madsen reconnaît la dépouille d’Åsa Hagen, avec qui il a travaillé en tant que reporter de guerre. Elle se serait suicidée en se noyant. Elle enquêtait sur la mutilation de mammifères marins et elle s’était fait quelques ennemis, notamment parmi les baleiniers. Nils connaissait très bien Åsa avec qui il a entretenu une relation forte, il ne peut admettre qu’une femme de la trempe d’Åsa se soit donné la mort ainsi. Il va enquêter sur cet étrange suicide.
Le cadre donne à ce roman une coloration spéciale, avec la neige, les étendues glacées et l’hiver polaire pendant lequel le soleil disparaît. Plus de trois mois sans autre lumière que celle des éclairages électriques et des aurores boréales verdâtres. Et puis, il y a la mer de Norvège et les mammifères marins dont il est beaucoup question : baleines, cachalots, bélugas, orques, dauphins, phoques. Il y a aussi ces étranges échouages : celui du cachalot près duquel on a trouvé le cadavre déchiqueté de l’étudiante en biologie arctique et celui du béluga qui intéressait beaucoup Åsa avant sa mort. Il est aussi question des méthodes de pêche des baleiniers qui ne s’embarrassent pas de la réglementation internationale de la pêche. Et enfin l’auteur nous dévoile l’intérêt que portent les militaires russes et américains aux animaux marins.
L’intrigue commence lentement par ce qui semble être un accident et un suicide. Elle prend ensuite de l’ampleur par les enquêtes qui font évoluer le point de vue pour finalement atteindre un dénouement bien surprenant.
Les personnages principaux sont des êtres marqués par les épreuves. La policière Lottie a subi une agression quand elle officiait à Oslo. Depuis, elle a des crises d’angoisse. En se faisant muter dans un endroit tranquille, elle espérait que ça passerait. Le journaliste Madsen a couvert les guerres d’Irak, d’Ukraine, d’Afghanistan. Il a vu un certain nombre d’horreurs. Chacun investigue de son côté, avant que les deux enquêtes ne convergent pour arriver à un aboutissement inattendu.
Une intrigue progressive et bien construite, des personnages meurtris mais tenaces, un décor totalement dépaysant et une belle ambiance polaire sont les composants de ce roman aussi distrayant que surprenant. Certains éléments semblent tirés d’une œuvre de science-fiction, mais ils sont basés sur des faits ayant réellement existé.
Extrait :
– Entre 2018 et 2019, nos anciens militaires ont acheté des terrains dans la baie de Nakhodka, dans l’Extrême-Orient russe. Là-bas, ils capturaient des bélugas et des orques et les retenaient dans des enclos flottants en attendant de les vendre à leurs clients chinois. Tout allait pour le mieux, jusqu’à ce que des écologistes découvrent les bassins et lancent une grande campagne pour faire fermer ce qu’ils appelaient « la prison des baleines ».
Niveau de satisfaction :
(4,2 / 5)