Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2012 (Reykjavikurnatur)
Date de publication française : 2015 (Métailié, Points)
Traduction (islandais) : Eric Boury
Genres : Enquête, sociologique
Personnage principal : Erlendur, policier
Ce n’est pas le premier roman policier d’Indridason, mais c’est la première enquête d’Erlendur, qui deviendra rapidement son homme de confiance.
Reykjavic, début du XXIe siècle. Le jeune Erlendur (28 ans) travaille sur une patrouille de nuit avec deux étudiants en droit, Gardar et Marteinn, qui ont obtenu cet emploi d’été dans la police. Leur travail consiste surtout à gérer les disputes entre fêtards imbibés d’alcool, prendre soin des clochards refusés dans les refuges parce que trop ivres et, à la rigueur, intervenir dans quelques disputes familiales ou pour quelques infractions plus importantes comme des vols ou des crimes liés au trafic de drogues. Ce n’est pas un travail palpitant, mais Erlendur est satisfait parce que ses deux stagiaires sont sympathiques et que la nuit est plus calme que le jour. Erlendur aime le calme, la sobriété, une certaine solitude, et le silence ne l’effraie pas. Il demeure seul pour le moment mais sa copine, depuis plus de deux ans, souhaiterait qu’il partage un appartement avec elle, ou, mieux, qu’il achète une maison.
Au cours de ses nuits de patrouille, Erlendur rencontre à quelques reprises un sans-abri presque toujours ivre, Hannibal, avec qui il jase un peu. Or, un jour, Hannibal est retrouvé noyé dans un étang; compte tenu de son taux d’alcool avancé, on suppose qu’il est tombé dans l’eau accidentellement. Loin d’être convaincu, Erlendur décide, à titre personnel, de prendre les choses en mains. Pendant ses recherches, une jeune femme appelée Oddy est portée disparue : a-t-elle volontairement quitté son mari qui la battait, s’est-elle suicidée ou a-t-elle été assassinée ? Erlendur découvre qu’elle est passée près du refuge d’Hannibal le jour où il est mort.
Les enquêtes sur la mort d’Hannibal et sur la disparition d’Oddy restent officiellement ouvertes, mais la police prend pour acquis qu’Hannibal a été victime d’un accident et qu’Oddy s’est suicidée. Après bien des détours, des hypothèses testées, des entrevues non officielles avec des témoins ou des suspects, Erlendur arrive à une autre conclusion dans les deux cas.
Les nuits de Reykjavic décrites depuis une auto-patrouille ne sont pas très gaies. Les interventions policières sont très ponctuelles. Mais l’enquête d’Erlendur permet de constater que la capitale islandaise connaît aussi des crimes de plus grande envergure. Ça nous permet aussi de saisir qu’Erlendur est tenace et fonceur. Pas facile de comprendre pourquoi il s’est autant impliqué dans le cas d’Hannibal, même si certains souvenirs de son passé nous font sentir son besoin de venir en aide aux laissés-pour-compte.
L’histoire est assez complexe et il ne faut pas essayer de découvrir l’assassin avant la police. La construction du récit est habile et permet au lecteur de respirer : une cinquantaine de chapitres d’une huitaine de pages. Et comme c’est le premier tome de la série Erlendur, c’est surtout la personnalité du policier qui s’y développe : un homme assez ordinaire, plutôt solitaire, tenace, obstiné même, peu liant mais loyal.
Une série qui promet.
Extrait :
Erlendur possédait un vieux tacot qu’il prenait parfois pour quitter la ville. Il se garait alors au bord de la route et allait marcher dans les montagnes en emportant une tente quand les prévisions météo étaient bonnes. Il ne se considérait toutefois pas comme un randonneur même s’il s’était inscrit à l’Association touristique d’Islande dont il recevait le bulletin annuel. Il n’avait participé qu’une seule fois aux activités de cette association en guidant un grand groupe de marcheurs jusqu’aux sources chaudes de Landmannalaugar. Il avait alors compris qu’il détestait voyager avec des gens qui manifestaient en permanence de la gaîté. Toute cette joie avait quelque chose d’oppressant.
Niveau de satisfaction :
(4 / 5)