Par Michel Dufour
Date de publication originale : 2011 (Vinterstengt)
Date de publication française : 2017 (Gallimard)
Genre : Enquête
Personnage principal : William Wisting, inspecteur de police (Larvik, à une centaine de km d’Oslo)
J’avais bien aimé Les chiens de chasse, le premier polar de Horst à être traduit en français. C’était le huitième de la série des William Wisting, qui a raflé bien des prix. Fermé pour l’hiver est le septième. On y retrouve les paysages norvégiens dans une saison pluvieuse et fraîche : l’hiver s’en vient. Une grande importance est encore accordée à ses compagnons (et compagnes) de travail; on compare volontiers Wisting à Walander mais, alors que Walander gère vraiment la répartition du travail entre ses comparses, les événements auxquels est affronté Wisting sont d’une telle ampleur qu’il contribue forcément avec d’autres services policiers impliqués malgré lui dans l’affaire qui l’intéresse.
Dans ce cas-ci, ce qui a l’apparence d’un petit vol de chalets débouche sur une sorte de trafic de drogues international, crimes et châtiments inclus. Le début de l’enquête est lent et, tandis qu’on nage dans la grisaille nordique, plusieurs incidents bizarres se produisent : des oiseaux viennent mourir étrangement autour du chalet de Wisting (qu’habite actuellement Line, sa fille), le propriétaire d’un chalet, et animateur connu d’une émission télé, disparaît, un sombre individu venu de nulle part agresse Wisting et vole sa voiture, le cadavre d’un cambrioleur est dérobé à la morgue et des appartements suspects sont incendiés. Line a un rôle moins important que dans le roman précédent, mais elle semble liée à l’enquête du fait qu’elle fréquente un beau et jeune récidiviste qui est copropriétaire d’un resto-bar où se retrouvent de louches personnages.
Malgré ces événements spectaculaires, le roman est assez long pour que Horst nous fasse profiter de son expérience passée de policier, ce qui serait sans doute très utile dans un cours de techniques policières : quels sont les indices que laisse derrière lui un incendie, qui nous permettent de comprendre comment il s’est développé, quelle est sa source et la nature de son origine ? Qu’est-ce qu’il faut à un policier pour devenir un expert en interrogatoires et qui ne se trouve pas dans le contenu de ses cours ? En quoi consiste l’art de la surveillance ? Comment utiliser les outils modernes de la technologie pour identifier un individu, retracer le parcours d’une automobile, communiquer à plusieurs en même temps. De sorte que l’enquête ne se réduit pas à une suite d’interrogatoires plus ou moins efficaces.
Il y a là de la matière pour faire un très bon film (ou série télé). Dans un roman comme celui-ci, le lecteur doit peut-être prendre des notes, parce qu’il y a beaucoup de personnages et que les noms norvégiens ne sont pas faciles à mémoriser. L’intrigue est passablement compliquée (et les hypothèses explicatives très diversifiée), de sorte qu’on apprécie que Wisting résume souvent la situation, rappelle ce qui a été fait et annonce ce qui devra être fait. Quant au rythme, aux rebondissements et à l’originalité des personnages, on pense moins à Mankell ou au Larsson de Millénium qu’à l’Islandais Ragnar Jonasson. Nul doute, cependant, que l’expérience de policier de Horst nous fait entrer dans l’intimité du travail policier et des organisations criminelles.
Extrait :
La pluie cingla le pare-brise quand Wisting sortit du garage du commissariat. Un torrent gris. Il alluma les essuie-glaces. Les gouttes étaient repoussées, revenaient, disparaissaient de nouveau.
L’eau s’écoulait le long des trottoirs et formait des mares là où les égouts ne parvenaient pas à l’évacuer.
Il descendit Prisegata et prit à gauche au feu de la gare. Les rues étaient désertes, nimbées d’un voile humide.
Le trajet jusqu’à Revet ne prit guère plus de trois minutes. On l’arrêta à un barrage routier. Deux voitures sérigraphiées étaient postées face à face. Et devant elles encore une voiture de police.
Un policier en cape de pluie vint le trouver. Ses bras reposaient sur un pistolet-mitrailleur suspendu sur sa poitrine.
Wisting baissa sa vitre. Le policier le reconnut et le salua en portant deux doigts à sa casquette.
– Du nouveau ? s’enquit Wisting.
Le policier secoua la tête. Des rideaux de pluie balayaient la zone industrielle. L’hélicoptère œuvrait en larges cercles.
Dans son rétroviseur, Wisting vit les phares d’une voiture. Le policier se redressa et regarda dans la même direction. Une petite Golf rouge s’arrêta derrière lui, et Garm Sobakken du journal local en bondit.
– Que se passe-t-il ? interrogea-t-il en se postant sous la pluie.
Le policier en tenue ne répondant pas, le journaliste s’adressa à Wisting.– Nous cherchons une voiture volée, expliqua ce dernier.
– Avec armes et hélicoptère ?
Niveau de satisfaction :
(4,1 / 5)