Le Palais de l’infortune – Donna Leon

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 2023 (So Shall You Reap)
Date de publication française :
2024 (Calmann-Lévy)
Traduction (américain) :
Gabriella Zimmermann
Genres : enquête, sociologique
Personnage principal :
Commissaire Guido Brunetti

J’entre dans un Donna Leon comme dans une vieille chemise; j’ai suivi les 31 enquêtes de Brunetti et j’ai appris à connaître sa famille : les cours de Paola à l’Université, leur fille Chiara, originale et végétarienne; et l’entourage de Brunetti au travail : les promotions de Vianello, les jeux de pouvoir avec Patta, l’affreux Scarpia, la fulgurante Elettra, la récente Griffoni. Pour Donna Leon, la ville de Venise et la fréquentation des principaux personnages sont aussi importantes que l’intrigue policière comme telle. Je dirais même plus importantes dans ses derniers romans. On avait déjà remarqué que la réflexion sur des problèmes sociaux prenait de plus en plus de place dans ses romans. Le temps accordé aux situations familiales de Brunetti, et à ses amitiés, est de plus en plus fréquent également. J’y insiste parce qu’un nouveau lecteur de Donna Leon, qui s’intéresserait peu à la famille Brunetti ou à Venise la magnifique, risque de trouver bien mince l’attention accordée à l’intrigue policière.

Dans ce cas-ci, il n’aurait certes pas tort. Un Sri Lankais qui travaillait au palazzo Zaffo dei Leoni est retrouvé mort, poignardé et noyé. En enquêtant sur cette mort, Brunetti deviendra le copain d’une religieuse qui habite au Couvent dont les terres rejoignent celles du palazzo. Puis, il est amené à scruter la vie de trois contestataires des années 70, qui préconisaient la violence pour en finir avec le capitalisme. Un des trois est mystérieusement disparu. Un deuxième se spécialise dans les œuvres d’art, et le troisième est retrouvé mort enterré dans les broussailles du palazzo grâce au chien adopté par la religieuse. Des soupçons pèsent sur un type qui pourrait être accusé au moins de complicité de meurtre; et on ne sait toujours pas qui a tué le Sri Lankais.

Dans cette histoire, Vianello et Paula ne font que passer; et Elettra reviendra tardivement d’un congrès à l’étranger. Mais Donna Leon a le souci de s’ancrer dans la réalité actuelle en consacrant deux chapitres à une réflexion sur l’homosexualité et quelques paragraphes à la présence des jeunes dans les gangs de rue. En immergeant Brunetti dans la vie quotidienne et en le montrant chercher des indices pas à pas sans trop de succès, l’auteure a probablement voulu nous faire sentir la frustration fréquente du travail policier, parfois compensée, heureusement, par quelque beau hasard.

Extrait :
Brunetti s’approcha de la chienne qui s’apprêtait à se lever pour le rejoindre.
« Non », assena-t-il d’un ton farouche, et la chienne fit mine de se cacher en se couchant et en se couvrant les yeux avec ses pattes.
Il s’approcha d’elle davantage encore et aperçut ce à quoi il s’attendait. « Sara, dit-il. Brave bête.» Il tapa sur ses genoux en disant : « Viens ici, mon bon chien.
Pas très rassurée, elle leva en hésitant une patte, puis l’autre et, se faisant toute petite, elle rampa jusqu’à lui. Il gardait les yeux sur elle et une fois parvenue à ses côtés, il lui dit : « Assieds-toi » et elle s’exécuta.
Ce n’est qu’à ce moment qu’il put examiner l’endroit où Sara avait joué avec ce qu’elle avait trouvé en creusant dans le jardin de l’autre côté du mur. Il ne savait trop si c’était l’os d’une jambe ou d’un bras, mais il savait que c’était un os humain.

Venise la nuit

Niveau de satisfaction :
3 out of 5 stars (3 / 5)

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