Arsène Lupin contre Herlock Sholmès – Maurice Leblanc (1864-1941)

Par Michel Dufour

Date de publication originale : 1906, puis Librairie Générale Française, 1963
Genres :
Aventures, enquête
Personnages principaux :
Arsène Lupin, Herlock Sholmès

On semble revenir à Maurice Leblanc depuis quelque temps alors que, de son temps, Leblanc se sentait moins apprécié que des auteurs comme Gaston Leroux ou Allain-Souvestre. Évidemment, les romans de Leblanc, je pense surtout aux Arsène Lupin, sont plus fantaisistes. On a conclu que son œuvre n’était pas sérieuse ! On est effectivement loin de Maupassant et de Flaubert qu’il a fréquentés dans sa jeunesse. Il a connu Allais à Paris, journaliste lui aussi, mais rapidement reconnu comme un grand conteur. De sorte que, malgré l’abondance et la qualité de son œuvre, Leblanc est resté une sorte de marginal. Le fait est qu’Arsène Lupin nous est plus familier que Maurice Leblanc.

Arsène Lupin contre Herlock Sholmès contient deux épisodes, La Dame blonde et La Lampe juive, publiés d’abord en 1906 dans le journal Je sais tout, puis sous forme de volume en 1908 et en 1914. Dans le premier, M. Gerbois, professeur de mathématiques au lycée de Versailles, achète chez un marchand de bric-à-brac un petit secrétaire en acajou. Le lendemain, le meuble disparaît. Alors que d’autres objets précieux, dont des pièces d’or dans le porte-monnaie de Suzanne, n’ont pas été touchés. Puis, Gerbois apprend qu’il a gagné un million au tirage de la loterie des Associations de la Presse. Sauf que le billet avait été rangé dans le secrétaire. Et c’est Arsène Lupin qui réclame le million puisque c’est lui qui a le billet. Devant les récriminations de Gerbois, il lui propose de séparer le million en deux. Gerbois refuse. Sa fille Suzanne est kidnappée. Gerbois accepte. La Dame blonde rend Suzanne à son père : les deux femmes ont voyagé en Europe depuis la disparition de Suzanne. Ganimard et ses collègues policiers cernent la demeure de l’avocat de Lupin. Arsène et la Dame disparaissent à leur tour.

En mars suivant, le baron d’Hautrec est assassiné. Il semble qu’on n’ait rien volé, même pas le fameux diamant bleu. Mais Antoinette Bréhat, la demoiselle de compagnie engagée récemment, est disparue. Le diamant bleu est vendu à l’encan et acheté par la comtesse de Crozon. Mais on lui dérobe ce bijou. Ganimard enquête en vain. Il est décidé de faire appel à Herlock Sholmès. Commence alors le duel entre Sholmès et Lupin.

L’affrontement se poursuit dans La Lampe juive.

Même si c’est présenté comme deux épisodes, ce récit ne ressemble au premier que parce qu’il s’agit d’un affrontement entre Lupin et Sholmès. Le Baron Victor d’Imblevalle demande l’aide de Sholmès pour retrouver la personne qui lui a volé une précieuse lampe juive, de même que la lampe, si possible. Holmès accepte mais Lupin le prie de ne pas accepter cette mission. Sholmès s’entête évidemment. Et mène à bien sa tâche … pour le grand malheur de tout le monde. Belle illustration de l’anti-proverbe : « Qui gagne perd ! »

Le roman a peu à voir avec la série qui a actuellement du succès sur Netfix. Peu à voir aussi avec la série de Georges Descrières parce que, malgré un bon rythme et des décors évocateurs, les scénaristes sont très inégaux et les jeunes premières, futures victimes consentantes de Lupin, jouent souvent très mal. Le roman est plein d’énergie, c’est presque essoufflant à lire, moult rebondissements en termes de déguisements, de passages secrets, d’escarmouches entre les deux grands hommes. On peut comprendre que Doyle n’ait pas trouvé très sympathique son Sholmès (surtout son attitude vis-à-vis de Wilson), mais il n’en est pas moins présenté comme un limier très subtil. Au centre de tout, c’est Lupin, attachant malgré sa suffisance, son arrogance et ses pitreries. Attachant comme un grand enfant brillant. Plutôt macho, gentil macho, c’est son époque, mais si séduisant et gentleman. Un Français comme on aime les imaginer.

Bref, un roman qui se lit bien, léger et distrayant.

Extrait :
Holmès tendit à l’homme d’équipe une pièce de cinquante centimes.
« Bien, mon ami. Voici pour vous.
– Merci, monsieur Sholmès. »
L’Anglais leva les yeux : Arsène Lupin.
« Vous !… vous ! balbutia-t-il, ahuri.
Et Wilson bégaya, en brandissant son unique main avec des gestes de quelqu’un qui démontre un fait :
« Vous ! Vous ! mais vous êtes arrêté ! Sholmès me l’a dit. Quand il vous a quitté, Ganimard et ses trente agents vous entouraient… »
Lupin croisa ses bras et, d’un air indigné :
« Alors vous avez supposé que je vous laisserais partir sans vous dire adieu ? Après les excellents rapports  d’amitié que nous n’avons jamais cessé d’avoir les uns avec les autres! Mais ce serait de la dernière incorrection. Pour qui me prenez-vous ? »
Le train sifflait.
Enfin, je vous pardonne… Mais avez-vous ce qu’il vous faut ? Du tabac, des allumettes… Oui…Et les journaux du soir ? Vous y trouverez des détails sur mon arrestation, votre dernier exploit, maître. Et maintenant, au revoir, et enchanté d’avoir fait votre connaissance… enchanté vraiment !… Et si vous avez besoin de moi, je serai trop heureux… »

Le Paris d’Arsène

Niveau de satisfaction :
4 out of 5 stars (4 / 5)

 

 

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