Mad Dogs – James Grady

Par Raymond Pédoussaut

mad-dogsDate de publication originale : 2006 Grady
Date de publication française : 2009 (Payot & Rivages) et 2013 (Rivages/Noir)
Genres : Thriller, espionnage
Personnages principaux : Victor et 4 autres ex-agents de la CIA victimes de syndromes post-traumatiques

Ils sont cinq à être internés à Cingléville. C’est ainsi qu’ils appellent Ravens Castle, un centre de soin caché où sont soignés des ex-agents de la CIA qui ont subi des traumatismes psychologiques très importants pendant qu’ils étaient en mission. Ils sont soignés mais surtout tenus au secret. Il y a quatre hommes et une femme. Un jour la routine quotidienne des soins  est bouleversée : leur psychiatre est retrouvé mort. Tout indique que c’est eux qui l’ont assassiné. Connaissant la maison ils en déduisent que quelque chose de grave se trame contre eux. Plutôt que d’attendre de voir quel sort on leur réserve, ils décident de prendre les devants et de s’évader. Comme anciens de la CIA, ils ne manquent pas de ressources, ils réussissent à sortir de l’hôpital-prison et les voilà en cavale. À leur crainte d’être liquidés par leurs anciens partenaires, s’ajoute l’angoisse d’être privés de leurs médicaments et de disjoncter prochainement. Après quelques tergiversations, ils décident de se diriger vers Washington où ils espèrent trouver les raisons de ce retournement de leur ex-employeur contre eux.

L’intrigue installe un bon suspense et pose beaucoup de questions : pour quelles raisons s’en prend-on à ces anciens serviteurs de l’état américain ? Et surtout pourquoi en ce moment, alors qu’ils sont inoffensifs, victimes de crises de folie, sous traitement psychiatrique, enfermés et tenus au secret ? Qui est derrière cette étrange opération ? Le dénouement final apporte une réponse astucieuse et assez inattendue à toutes ces interrogations.

Les cinq personnages principaux sont à la fois forts et fragiles. Ce sont des anciens espions qui savent se battre et se défendre, ils connaissent toutes les ficelles du métier. Mais ce sont aussi des malades mentaux qui, lorsqu’ils sont mis dans une situation particulière, peuvent laisser libre cours à leur phobie et devenir incontrôlables. Ainsi, le narrateur, Victor, est suicidaire. Zane, ne supporte pas la chaleur. Éric obéit aveuglément à un ordre. Russel a un blocage devant les femmes depuis qu’il a été obligé d’abréger les souffrances d’une femme en ex-Yougoslavie. Hailey, la jeune femme, est en train de mourir, elle se sait condamnée par le virus du sida. Cette équipe de chiens fous, se dirige vers Washington pour chercher la solution à cette énigme.

James Grady nous montre un tableau des services de renseignements américains qui n’inspire pas beaucoup la confiance. Dans l’assassinat du psychiatre, toutes les hypothèses sont possibles. Il peut être l’œuvre :
– D’une organisation extérieure ennemie.
– De la CIA elle-même.
– D’un groupe interne mais dissident.
Rien n’est impossible dans ce monde trouble du renseignement. La compartimentation des services et la concurrence qui règne entre eux permet d’envisager toutes les possibilités. L’épilogue propose une solution pas rassurante du tout. Il y a peut être plus fou que ceux qui sont officiellement reconnus comme tels. Au passage l’auteur en profite pour dénoncer, avec une ironie mordante, l’usage intensif des médicaments qui sévit dès l’école.

James Grady qui a été journaliste politique et attaché aux commissions sénatoriales, sait de quoi il parle. Il a notamment passé une année auprès du sénateur démocrate Metcalf au cours de l’épilogue du Watergate. Il a connu un succès mondial dès son premier roman The Six Days of the Condor (1974)  devenu Les Trois jours du Condor, au cinéma, film tourné par Sydney Pollack, avec Robert Redford et Faye Dunaway (1975).

Mad Dogs est un roman divertissant, plein de suspense, mais aussi un peu inquiétant par ce qu’il révèle du fonctionnement du service de renseignement le plus puissant du monde.

Extrait :
La vie peut se résumer à une porte. Un panneau de bois marron peut signifier : « impossible de faire demi-tour ».
Ce panneau marron. Cette porte. Avec cette serrure qui indiquait qu’on affrontait nos « moi » les plus forts, les sentinelles de l’ombre qui nous avaient créés. On affrontait l’Oncle Sam.
Et il avait tout ce qu’il fallait. Les lunettes à vision nocturne. Les satellites qui envoyaient des images de vidéosurveillance de l’espace. Des scanners à infrarouge pour « voir » à travers les murs. Des cavernes remplies d’ordinateurs qui calculaient plus vite que la course d’une balle. Des avions furtifs dotés de bombes intelligentes pour les frappes chirurgicales. Des protections pare-balles et des lance-flammes. Un milliard de dollars sur des comptes bancaires secrets. Des guerriers secrets du SAD, des trouble boys et des hotshots armés de mitraillettes munies de réducteurs de son. Des hélicoptères noirs. La putain de bombe atomique.
Tout ça derrière cette porte.
Nous, on avait quelques armes volées, la bagnole d’un mort et un maximum de folie.

Soudain, les haut-parleurs qui diffusaient un CD de musique douce, vendu au comptoir, passèrent au spectaculaire « Jungleland » de Springsteen et je compris que Russell avait fait du charme à la barista pour qu’elle mette un de ses CD.

Bruce Springsteen – Jungleland

 Ma note : 4 out of 5 stars (4 / 5) Maddogs-amb

 

 

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2 réponses à Mad Dogs – James Grady

  1. Fabe dit :

    Avis très intéressant, je me demande si de par sa position de journaliste politique dans la vie on peut supposer que il y a du « vécu » là dedans ?
    J’aime bien quand c’est du domaine du « possible ».

    • Ray dit :

      James Grady se sert de son expérience de journaliste politique pour écrire ses romans. Il a aussi fait un stage auprès d’un sénateur démocrate à Washington. Il est probable qu’il soit un peu au courant des agissements des services de renseignement. Mais là c’est un roman qu’il a écrit, ce n’est pas une enquête ou un reportage, alors je pense qu’il y a une part de vérité dans cette histoire et une part d’imagination. Seul l’auteur sait quelles proportions occupent occupent l’une et l’autre de ces deux parts.

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